"Vous" l'avez voulu...
Énergie : les propositions irréalistes du RN
Baisser la facture d'électricité des Français, supprimer les éoliennes et revenir sur l'interdiction des voitures neuves thermiques en 2035, voilà probablement le triptyque énergétique sur lequel s'appuiera encore le parti de Jordan Bardella lors de la campagne législative.
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Refaire de la France un paradis énergétique», c'était l’une des promesses phares de Jordan Bardella lors de la campagne des européennes qui vient de s'achever. Elle devrait figurer de nouveau en bonne place dans le programme du Rassemblement national à l’occasion des élections législatives anticipées de cette fin juin. Derrière ce slogan, il y a l'idée de tourner la page de la crise énergétique et de faire baisser les factures des Français.
Pour y parvenir, ce parti n'a pas peur de se contredire.
Longtemps, il a plaidé pour une sortie du marché européen de l’électricité. Sa position est désormais plus subtile et quelque peu acrobatique. Sur les énergies renouvelables aussi, son avis a varié. Historiquement, le RN s'affiche pro-nucléaire, considérant que seule cette énergie peut nous apporter souveraineté et indépendance. Il cite également, sans plus de précisions, l'hydrogène et la géothermie parmi ses priorités. En revanche, il est opposé depuis toujours au développement des énergies renouvelables jugées peu fiables et coûteuses. Avec quelques inflexions ces derniers mois : seules les éoliennes sont désormais systématiquement décriées. Le photovoltaïque est passé sous silence et les centrales hydrauliques célébrées. Entrons dans le détail de trois mesures symboliques portées par le Rassemblement national.
Baisser la facture d’électricité des Français de 30 à 40%
Plus question donc de sortir du marché européen de l’électricité. La France y resterait mais ne suivrait plus ses règles. Elle obtiendrait une dérogation pour fixer son propre prix de marché de l’électricité, l’idée étant de le rapprocher «des coûts de production sur notre sol», pouvait-on lire dans son programme européen. Soit les coûts du nucléaire d’EDF.
Pour commencer, juridiquement, la France ne pourrait tout simplement pas rester dans le marché européen de l’électricité sans suivre les règles communes. Si elle fixait son propre prix, elle créerait une situation de distorsion de concurrence et serait sanctionnée par l’Union européenne. On voit d’ici la tête de nos voisins si l’on prenait cette décision qui provoquerait un beau chaos. Cela remettrait aussi en cause le principe de solidarité qui permet d’exporter et d’importer de l’électricité à tout moment de façon fluide avec les autres Etats membres et de planifier ces transactions aux meilleurs prix.
Nous serions alors obligés d’acheter plus cher l’électricité que nous avons besoin d’importer en petite quantité toute l’année, même si nous sommes majoritairement exportateurs.
Par ailleurs, prétendre que cela permettrait de faire baisser la facture d'électricité des ménages de 30 à 40% est tout simplement faux. Notre facture se divise en trois parties : un tiers pour les taxes, un tiers pour le coût d’acheminement (le réseau) et un tiers pour le coût de fourniture (l’énergie). Or, le nouveau prix de marché ne jouerait que sur une partie de ce dernier tiers. Impossible donc de réduire l’ensemble de la facture de 30 à 40%. Le Rassemblement national laisse cependant entendre qu’il baisserait aussi les taxes, à commencer par la TVA, ce qui aurait pour conséquence de réduire les recettes de l’Etat. La TICFE (Taxe Intérieure sur la Consommation finale d'Électricité) aussi serait visée, alors qu’elle sert notamment à développer les énergies renouvelables et aider les foyers en situation de précarité énergétique.
Les plus pauvres en pâtiraient donc.
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Pour finir, il paraît très hypothétique que le Rassemblement national parvienne à abroger cette interdiction.
Pour cela, il faudrait que son groupe européen Identité et Démocratie parvienne à passer une alliance avec la droite traditionnelle (PPE) pour obtenir que le futur Commissaire européen rouvre le débat en 2035/2036. Il ne serait ensuite pas au bout de ses peines. «Cela engagerait un processus très lourd. Il faudrait alors proposer une alternative pour atteindre les objectifs de réduction des émissions. Et la faire approuver à la majorité absolue du Parlement, ce qui paraît extrêmement compliqué», faisait observer il y a peu Anna Creti, directrice de la chaire d’économie du climat à l’Université Paris Dauphine.
On attend maintenant de voir si le Rassemblement national va reprendre toutes ces promesses irréalistes dans la courte campagne législative qui va débuter prochainement.
https://www.capital.fr/economie-politiq ... rn-1498032
Le joueur de flûte en marche...