Le site d'informations Mediapart a fait état mardi d'un rapport interne très critique de l'Agence du médicament (à l'époque Afssaps) sur l'absence d'alerte de l'agence concernant les prothèses PIP contenant du gel de silicone non conforme, et qui aurait été dissimulé au ministre de la Santé de l'époque. Le professeur Dominique Maraninchi, patron de l'Agence du médicament ANSM, "dément toute dissimulation". Selon lui, "le document évoqué a été écrit par un salarié deux mois après la remise du rapport officiel rendu public" le 1er février 2012.
Pour sa part, Mediapart affirme que ce rapport a été rédigé au 1er trimestre 2012, puis saisi lors d'une perquisition au siège de l'Agence du médicament en avril 2012 à la demande de la juge d'instruction Annaïck Le Goff. Selon le site, "la direction de l'agence n'a pas divulgué ce document interne dont elle avait connaissance, mais a diffusé un rapport officiel, remis à Xavier Bertrand en février 2012, expurgé des informations les plus gênantes pour l'Afssaps".
"L'Afssaps aurait dû réagir dès 2007" (rapport interne)
D'après le rapport cité par Mediapart, "l'augmentation des ruptures pour les prothèses PIP est amorcée dès 2006" et "l'Afssaps aurait dû réagir dès 2007 et au plus tard en 2008", alors que la recommandation d'un retrait préventif pour toutes les femmes a été annoncée par les autorités sanitaires françaises fin 2011. Pour l'ANSM, "ce n'est que deux mois après la remise publique du rapport officiel qu'un salarié de l'ANSM a remis de sa propre initiative à la direction générale une analyse personnelle et rétrospective établie sur la base des mêmes données toxicologiques et de matériovigilance que celles figurant dans le rapport remis au ministre de la Santé d'alors (Xavier Bertrand) le 1er février 2012".
"Il est donc inexact d'alléguer que le rapport officiel rendu public deux mois plus tôt aurait été expurgé des éléments contenus dans ce document", soutient l'agence. "Une instruction judiciaire étant ouverte sur ce dossier, l'agence a spontanément remis au juge en charge de l'instruction le document élaboré par son salarié", assure l'ANSM. Réagissant aux affirmations de Mediapart, Me Philippe Courtois, avocat des victimes PIP, a estimé que l'agence n'a "rien fait pendant deux ans". "Avec un tel rapport, la mise en examen de l'agence doit être opérée rapidement. On est exactement dans la même situation que le Mediator", a-t-il déclaré.
7 186 implants défectueux
Plus de 16 000 femmes se sont fait retirer leurs prothèses mammaires PIP contenant un gel de silicone frauduleux, selon le dernier bilan arrêté fin mai par l'ANSM. Le taux de "défaillance" constaté sur les implants PIP retirés est "à ce jour de 25,4 %", avec 7 186 implants défectueux sur les 28 276 retirés chez 16 426 femmes. Le nombre de femmes porteuses de prothèses PIP en France est estimé à environ 30 000. Les retraits préventifs avaient commencé après la suspension de la commercialisation de ces implants en mars 2010.
Ils se sont accélérés à partir du début 2012, après la décision du ministère de la Santé de proposer des explantations, même en l'absence de signes cliniques de détérioration de l'implant. Un procès s'est déroulé en mai devant le tribunal correctionnel de Marseille contre le fondateur et patron de PIP, Jean-Claude Mas, qui nie la dangerosité de ses produits. Le jugement doit être rendu le 10 décembre.