IAM, les années passent, les hommes restent debout
Posté : 22 avril 2013 10:45
Obéissant à la marque de fabrique du groupe, le sixième album des rappeurs d'IAM, Arts martiens est introduit par une tirade inspirée d'un film : "Nous sommes des hommes libres, debout, et nos faits d'armes resteront dans les mémoires, même sur nous, le temps s'effrite." Le temps a laissé sa marque sur le visage des cinq membres d'IAM, 46 ans de moyenne d'âge. Leur bonne humeur, leur enthousiasme sont restés, en revanche, intacts.
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Dans un hôtel parisien, les cinq Marseillais se charrient et parlent avec la même passion de leur art : le rap, les outils vintage qu'ils utilisent toujours pour composer, le sampleur MPC 3000 et la boîte à rythmes SP 1200, les nouveaux logiciels. L'album est à l'image de leurs vingt-cinq ans de carrière : dense, référencée, à la fois émouvante et politique – avec toujours cette manie de disserter sur les comics (Marvel) ou sur les samouraïs (le moins inspiré Benkei et Minamoto).
Commentaires politiques
Les rappeurs d'IAM sont revenus à leurs bases, ils ont arrêté "la course à la nouveauté" qui avait plombé le précédent Saison 5. L'architecte musical du groupe, Imhotep, précise : "Le fait d'avoir dû travailler dans un temps limité, dans des ateliers assez proches, nous a permis d'être plus interactifs que sur les albums précédents où on mettait les choses en commun au dernier moment. Là, l'album sonne plus compact, plus IAM que jamais."
Leur sixième album devait être un hommage à Ennio Morricone, mais ils ont abandonné le projet devant les exigences posées par les éditeurs du compositeur de film. Désormais signé chez le label mythique du rap américain, Def Jam, IAM continue de commenter l'actualité française à travers des titres comme La Part du démon, Misère, ou Le Pain au chocolat. Ce dernier a été inspiré par la déclaration de Jean-François Coppé, président de l'UMP, à Nîmes en octobre 2012, sur ce collégien nîmois "qui se serait fait arracher son pain au chocolat par des voyous car on ne mange pas pendant le ramadan".
Akhenaton regrette que les politiques aient emprunté le goût des rappeurs français pour la phrase-choc (la punchline) : "Les hommes et les femmes politiques vont à la télé pour lâcher la phrase qui va leur permettre de vivre médiatiquement pendant trois jours. Si on répond par un couplet maladroit pour terroriser les petits Jean-François, rien n'avancera. Ce qui est intéressant, c'est de comprendre pourquoi Copé a dit cette phrase."
Dans La Part du démon, IAM renie même le rêve capitaliste dans lequel les rappeurs se sont engouffrés : "On était des petits ordinaires, des gosses tranquilles/On nous a vendu la fiche d'une vie rose en kit." Selon Akhenaton : "On nous a dit qu'en achetant plein de trucs, on serait acceptés dans la société. Mais le jour où vous cherchez un travail ou un appartement, le kit de cette vie rose n'est pas si efficace. Nous avons évacué l'aigreur, nous avons réalisé que nous sommes là où nous avons décidé d'être. Si nous arrêtons la musique, c'est la vie qui l'aura voulu." Des hommes "libres, debout", qui laisseront un beau patrimoine à la musique française.