Mai 68, une contre-révolution réussie de régis de debray
Posté : 02 mai 2008 22:09
podcast disponible sur le site de france 5,du 1 er mai 2008
Alors que l'on commémore Mai-68 en 1978, Régis Debray écrit une Modeste contribution aux discours et cérémonies officielles du dixième anniversaire. Quarante ans après les événements, le philosophe qui estime que l'évènement," et ce qu'il est devenu", en rééditant cet essai sous le titre Mai 68, une contre-révolution réussie. Ce changement d'intitulé est le fruit de son analyse : "Quand on fait une révolution, c'est pour renverser un régime, en l'occurrence le capitalisme. L à , on a plutôt renforcé le capitalisme (et) sacrifié les collectifs à la cause de l'individu".
Mai-68, affirme-t-il, "est devenu un peu l'emblème d'un changement (dans) les mÅ“urs, peut-être, mais il n'a pas été dans le civisme", qui a "beaucoup baissé. Il n'a pas été dans la domination du capital, qui est devenue bien plus forte qu'avant. Tout est marchandise aujourd'hui", observe-t-il. "Tout ne l'était pas avant 68."
Au fond, poursuit-il, "cela a été une révolte contre l'Etat, mais le problème, c'est que l'Etat cela produit de l'égalité", et l'économie "de l'inégalité. S'il n'y a pas un Etat pour redistribuer, faire des lois et des normes auxquels tous sont soumis, riches et pauvres en même temps, vous avez un accroissement des inégalités ; ce qu'il s'est produit depuis Mai-68".
Pour autant, selon Régis Debray, "Mai-68 n'est pas la cause, c'est un symbole", une "étiquette". Un "moment lyrique d'illusions (qui a) détruit le sens du collectif, le sens de la communauté, que ce soit la solidarité de classe (ou la) fraternité française (...) Liberté, égalité, fraternité, tout cela sont devenus des valeurs ringardes. Elles n'ont pas été remplacées par les Soviets, elles n'ont pas été remplacées par la gauche, elles ont été remplacées par la droite d'aujourd'hui."
Désormais, estime-t-il, "on n'est plus affilié à quelque chose, on n'appartient plus à quelque chose. On est seul. On est passé du droit du sol au droit du seul, c'est- à -dire que l'on est un peu tous contre tous. Chacun pour soi, comme dans un naufrage."
En réalité, Mai-68 est, pour le philosophe, "une sorte de convulsion qui a libéré tout ce qu'il y avait d'inconscient dans la société : le culte de l'image, le culte de l'égo - le tout à l'égo, qui est devenu aujourd'hui notre condition à tous -, le culte de la publicité. 'Sous les pavés la plage', oui, mais de publicité."
C'est "la victoire de l'image sur le mot et la victoire de l'individu sur le collectif". Une victoire qui a "de bons côtés, jusqu' à un certain point", car "l'individu tout seul, c'est aussi la détresse, la dérive, l'égoïsme, peut-être la guerre de tous contre tous, et peut-être à la fin, comme il y a un tel vide d'appartenance, le retour de tous les archaïsmes que l'on avait voulu dépasser. C'est- à -dire le retour du religieux, le retour du nationalisme, le retour du communautarisme".
Car conclut-il : "A force de vouloir se débarrasser du groupe et du collectif, aujourd'hui, c'est le groupe qui revient, parce que l'on ne peut pas vivre seul, sans repères, sans références et sans transcendance."
Alors que l'on commémore Mai-68 en 1978, Régis Debray écrit une Modeste contribution aux discours et cérémonies officielles du dixième anniversaire. Quarante ans après les événements, le philosophe qui estime que l'évènement," et ce qu'il est devenu", en rééditant cet essai sous le titre Mai 68, une contre-révolution réussie. Ce changement d'intitulé est le fruit de son analyse : "Quand on fait une révolution, c'est pour renverser un régime, en l'occurrence le capitalisme. L à , on a plutôt renforcé le capitalisme (et) sacrifié les collectifs à la cause de l'individu".
Mai-68, affirme-t-il, "est devenu un peu l'emblème d'un changement (dans) les mÅ“urs, peut-être, mais il n'a pas été dans le civisme", qui a "beaucoup baissé. Il n'a pas été dans la domination du capital, qui est devenue bien plus forte qu'avant. Tout est marchandise aujourd'hui", observe-t-il. "Tout ne l'était pas avant 68."
Au fond, poursuit-il, "cela a été une révolte contre l'Etat, mais le problème, c'est que l'Etat cela produit de l'égalité", et l'économie "de l'inégalité. S'il n'y a pas un Etat pour redistribuer, faire des lois et des normes auxquels tous sont soumis, riches et pauvres en même temps, vous avez un accroissement des inégalités ; ce qu'il s'est produit depuis Mai-68".
Pour autant, selon Régis Debray, "Mai-68 n'est pas la cause, c'est un symbole", une "étiquette". Un "moment lyrique d'illusions (qui a) détruit le sens du collectif, le sens de la communauté, que ce soit la solidarité de classe (ou la) fraternité française (...) Liberté, égalité, fraternité, tout cela sont devenus des valeurs ringardes. Elles n'ont pas été remplacées par les Soviets, elles n'ont pas été remplacées par la gauche, elles ont été remplacées par la droite d'aujourd'hui."
Désormais, estime-t-il, "on n'est plus affilié à quelque chose, on n'appartient plus à quelque chose. On est seul. On est passé du droit du sol au droit du seul, c'est- à -dire que l'on est un peu tous contre tous. Chacun pour soi, comme dans un naufrage."
En réalité, Mai-68 est, pour le philosophe, "une sorte de convulsion qui a libéré tout ce qu'il y avait d'inconscient dans la société : le culte de l'image, le culte de l'égo - le tout à l'égo, qui est devenu aujourd'hui notre condition à tous -, le culte de la publicité. 'Sous les pavés la plage', oui, mais de publicité."
C'est "la victoire de l'image sur le mot et la victoire de l'individu sur le collectif". Une victoire qui a "de bons côtés, jusqu' à un certain point", car "l'individu tout seul, c'est aussi la détresse, la dérive, l'égoïsme, peut-être la guerre de tous contre tous, et peut-être à la fin, comme il y a un tel vide d'appartenance, le retour de tous les archaïsmes que l'on avait voulu dépasser. C'est- à -dire le retour du religieux, le retour du nationalisme, le retour du communautarisme".
Car conclut-il : "A force de vouloir se débarrasser du groupe et du collectif, aujourd'hui, c'est le groupe qui revient, parce que l'on ne peut pas vivre seul, sans repères, sans références et sans transcendance."