battu, mais pas abattu, Bayrou se voit déjà en recours
Posté : 05 juillet 2012 18:06
Il y avait un grand absent mardi dans l’hémicycle : François Bayrou. L’ancien député des Pyrénées atlantiques est-il définitivement sorti du jeu politique ?
Premier principe : en politique, à ce niveau, rien n’est jamais définitif.
Dans le cas de François Bayrou, c’est vrai qu’il a été personnellement blessé par sa défaite dans « son » Béarn ; il ne s’en cache pas. C’est vrai que son parti a été laminé aux législatives. C’est vrai que parmi ses derniers supporters, certains songent à repartir à gauche, d’autres à réintégrer l’UMP ou à rejoindre Jean-Louis Borloo. C’est vrai qu’il dit vouloir observer une longue période de silence, de plusieurs mois. Mais malgré tout, ça François Bayrou y croit toujours. Il se voit déjà, il se voit encore, il se voit toujours dans le rôle du recours.
Quelle est son analyse ? Bien sûr, il a perdu ; ce serait difficile de prétendre le contraire. Mais, sur le fond, il pense avoir gagné. Si, si !
« Mon discours n’a pas été suivi, mais il a été entendu. » C’est ce qu’il confie. Et c’est ce qu’il développe dans une lettre qu’il envoie aujourd’hui même à tous les adhérents du Modem.
Ce qu’il veut dire, c’est que compte tenu de l’ampleur du chemin à parcourir pour revenir à l’équilibre budgétaire en 2017, François Hollande n’aura pas d’autre choix que de mettre en œuvre son programme, à lui, Bayrou. « Même la hausse d’un point de TVA, ils vont finir par y arriver », dit-il, même si, pour l’heure, le gouvernement dément y penser.
L’ancien candidat à l’Elysée poursuit son raisonnement. Cette cure de rigueur que Hollande est et sera contraint d’imposer aux Français conduira à un divorce au sein de la gauche. A la manière de ce qui s’est passé en Allemagne, quand la thérapie de choc de Gerhardt Schroeder a provoqué la scission du SPD et la naissance de « die Linke ».
Conclusion de Bayrou : d’ici 6 mois ou un an, à peine plus, le chef de l’Etat aura besoin d’un allié de rechange. Et pour peu que la proportionnelle lui rende une existence au Parlement, devinez qui serait prêt à lui permettre à d’aller au bout de sa politique de redressement...
François Bayrou n’est-il pas trop isolé pour être le moment venu un recours pour François Hollande ?
Si, évidemment. Il est aujourd’hui totalement seul. Mais pour un peu, il en ferait une force.
Il n’est plus au Parlement ? Il fait remarquer que Martine Aubry, Alain Juppé, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen n’y sont pas non plus, ce qui ne les empêche pas d’exister.
On peut penser que Jean-Louis Borloo a repris le flambeau du centre. Il a réussi à constituer un groupe de 29 députés, ce qui était loin d’être gagné. En réponse à Jean-Marc Ayrault, il a prononcé un discours brillant, original et remarqué. Mais Bayrou balaie la solution Borloo, en soulignant qu’il n’a jamais réussi à construire une force politique.
Et pour tout dire, François Bayrou ne se met pas dans la même catégorie. Quand on lui parle de son isolement, il répond en citant Mendès-France et de Gaulle. Rien de moins. De Gaulle, dont il fait remarquer qu’en 1957, un an avant d’être rappelé comme sauveur, 1 % seulement des Français souhaitaient son retour.
Il aime aussi citer des personnalités comme Churchill ou Clémenceau, qui ont également connu la défaite. Avec de telles comparaisons, on peut se dire que Bayrou est frappé d’orgueil, de naïveté ou d’inconscience. Il sait qu’il n’y a qu’une chance sur 10, voire sur 100 pour que son scenario aboutisse. Mais quinze jours après une telle déroute électorale, afficher un tel aplomb est, à tout le moins, un signe de résistance.