ce dimanche, troisième journée de la gentillesse
Posté : 13 novembre 2011 09:10
Une pensée ce week-end pour la réplique culte du film Le Père Noël est une ordure : "Je n'aime pas dire du mal des gens, mais effectivement elle est gentille." Dimanche 13 novembre a lieu en France la troisième journée de la gentillesse, opération lancée en 2009 par le mensuel Psychologies dans la foulée des "Kindness Weeks" qui existent un peu partout dans le monde. Facile de se moquer...
C'est une journée pour être gentil, notamment avec les collègues de bureau (quoique, le dimanche...), la famille, les amis et surtout les inconnus. Ou, au moins, pour réfléchir à l'idée de gentillesse. Je sais qu'en ce moment ce concept paraît déplacé. A-t-on envie d'être gentil avec les Grecs, les Italiens... ? Pas sûr. Les gentils n'ont pas bonne presse. D'ailleurs, François Hollande a tenté de gommer tout ce qui pourrait le faire ressembler à un homme politique gentil. Pour être président, il faut être dur, voire cynique, manipulateur et, si possible, florentin. Et ce n'est qu'un exemple. Rien à voir avec la journée du 13 novembre.
Mais qu'est-ce que la gentillesse au fond ? Heureusement, Emmanuel Jaffelin, philosophe, enseignant et déjà auteur de l'excellent Eloge de la gentillesse (François Bourin Editeur, 2010), vient de sortir un Petit éloge de la gentillesse très pédagogique chez le même éditeur. Une sorte de "gentillesse pour les nuls" qui ne veulent pas être pris pour des poires !
Pour bien comprendre la gentillesse, il faut partir des origines antiques du mot, le gentilis, ou noble romain devenu des siècles plus tard le "gentil homme" de la noblesse du Moyen Age. Un univers qui n'a rien de mièvre, au contraire, puisqu'il renvoie à l'oubli de soi dans le service à l'autre. Une servitude volontaire fondée sur l'humilité - et la gentillesse serait ainsi, nous explique Emmanuel Jaffelin, une modalité de l'empathie (l'enpathein grec, le compassio latin). Elle conduit celui qui la pratique à se défaire du moi roi pour se mettre en position d'infériorité face à celui auquel il rend service. Logique qu'elle n'ait pas bonne presse dans nos systèmes démocratiques égalitaires et individualistes.
Comme souvent avec les concepts dits "faibles", on peut l'aborder par ce qu'il n'est pas. La gentillesse, nous dit l'auteur, n'est pas la sollicitude, car cette dernière est pulsionnelle et intrusive. Elle ne se cantonne pas non plus au simple "respect", règle minimale du fameux "vivre ensemble" de nos temps de violence où on parvient à trouver sensationnel de ne pas se faire agresser plus souvent dans la rue...
Voici donc la gentillesse : une morale praticable et efficiente. Vue ainsi à travers le livre du bon professeur Jaffelin, la gentillesse sort de l'univers cucul (ou boy-scout... ou les deux) dans lequel les cyniques qui nous dirigent et tiennent les discours dominants aiment à l'enfermer. Le gentil n'est plus le personnage "bien brave" dont on se moque...
La gentillesse retrouve ses lettres de noblesse. Et c'est une bonne nouvelle.