le spectre d’une " Fraction Armée Brune " terroriste
Posté : 14 novembre 2011 00:02
Tout commence avec un pistolet de calibre 7,5 mm, de marque Ceska retrouvé par la police allemande dans les décombres de l’appartement de Beate Z., 36 ans, à Zwickau (est). La jeune femme avait fait exploser son logement quelques jours avant de se livrer aux enquêteurs mardi. Selon les expertises balistiques, l’arme a servi à commettre les meurtres jusqu’ici inexpliqués de huit hommes d’origine turque et un d’origine grecque dans des restaurants de kebab, entre 2000 et 2006, au nord du pays (Hambourg, Rostock), au sud (Nuremberg, Munich), et à l’ouest (Dortmund, Kassel). L’affaire a été confiée au parquet fédéral, compétent en matière de terrorisme.
Mouvance néonazie
Beate Z. était recherchée dans le cadre d’une enquête sur une attaque à main armée survenue le 4 novembre dans la région de Iéna (est).
Les deux auteurs présumés de l’attaque, Uwe B. et Uwe M., compagnons de longue date de Beate Z. au sein de la mouvance néonazie, ont été retrouvés morts peu après dans un camping-car, les enquêteurs privilégiant l’hypothèse d’un suicide.
Dans leur véhicule a été retrouvée l’arme d’une policière abattue d’une balle dans la tête en 2007 à Heilbronn (sud-ouest), un meurtre qui n’a jamais été élucidé.
Hier, les visages du trio s’affichaient sur la dernière page du plus grand quotidien populaire, Bild, et l’affaire faisait la une de la majorité des journaux.
« Pour la première fois depuis la Réunification, la République fédérale est confrontée à un terrorisme d’extrême-droite de grande ampleur », écrit le Tagesspiegel.
Dans le quotidien Die Welt, le chef du groupe parlementaire social-démocrate (SPD, opposition), Thomas Oppermann, appelle à un renforcement de la lutte contre l’extrême droite. « Cette affaire montre qu’il y a encore des extrémistes de droite prêts à la violence en Allemagne », regrette-t-il alors que la police, dans différents Etats régionaux, enquête, selon le journal, sur d’éventuels liens avec d’autres affaires.
Die Welt évoque un attentat à la gare de Düsseldorf en 2000 qui avait fait plusieurs blessés parmi des Juifs originaires d’ex-URSS venus s’installer en Allemagne ou encore l’explosion d’une bombe dans un quartier turc de Cologne en 2004.
Le spectre d’une « Fraction Armée Brune » apparaît dans plusieurs médias, en référence au groupe terroriste d’extrême gauche « Fraction Armée rouge » qui, des années 70 aux années 90, a tué plus de 30 personnes en Allemagne. « Les observateurs parlent déjà d’une éventuelle "Fraction Armée Brune" qui agirait depuis des années clandestinement », souligne ainsi le Tageszeitung.
Comme d’autres, le journal s’interroge par ailleurs sur le fait que le trio ait pu disparaître pendant 13 ans alors qu’un atelier de fabrication de bombes artisanales avait été découvert en 1998 dans un garage loué par Beate Z. à Iéna. Certains soupçonnaient les services de renseignement d’avoir utilisé les suspects comme informateurs sur le mouvement néonazi.
« Si les informations se confirment, ce serait la première fois qu’un groupuscule d’extrême-droite clandestin laisse une empreinte aussi sanglante en Allemagne », a en tout cas estimé le chef du principal syndicat de la police (GdP), Bernhard Witthaut, dans les colonnes du Süddeutsche Zeitung.
Cependant, selon ce quotidien qui s’appuie sur des sources anonymes au sein des forces de sécurité, il n’y a cependant pour le moment « aucun indice attestant l’existence d’un groupe terroriste structuré » dont le trio serait l’émanation.