projet de loi de la levée de l'anonymat du "sous X"
Posté : 05 décembre 2011 18:51
La députée UMP Brigitte Barèges doit déposer lundi une proposition de loi pour demander une levée de l'anonymat des femmes accouchant "sous X", un projet soutenu par plusieurs associations, mais qui suscite l'inquiétude du Planning familial et de pédo-psychiatres.
Depuis 2002, les femmes accouchant sous X sont seulement incitées à confier des données sur leur identité et les origines de l'enfant.
Si ce dernier cherche un jour à rencontrer sa mère, celle-ci peut alors être contactée par un organisme qui lui demandera de confirmer ou non son choix du secret. Mais cette possibilité est écartée de fait quand la mère souhaite un anonymat total.
Moins de 700 femmes ont accouché de façon anonyme en 2009, soit moins d'un accouchement sur 1.000, selon l'Institut national d'études démographiques.
La proposition de loi de Mme Barèges propose, dans la droite ligne de son rapport remis en début d'année, de lever cet anonymat, tout en laissant la possibilité à la mère d'accoucher "dans le secret" : elle devra obligatoirement laisser son nom mais le secret serait maintenu jusqu'aux 18 ans de l'enfant.
Elle pourrait aussi préciser d'autres éléments sur son état de santé ou ses antécédents génétiques, a-t-on indiqué dans l'entourage de l'élue.
"Nous soutenons à fond son projet", s'enthousiasme Graciane, présidente de l'association "X en colère" et qui a été adoptée en 1952. "On n'est pas tombé du ciel, on a besoin de savoir d'où l'on vient", souligne cette femme de 59 ans, insistant notamment sur la nécessité de connaître les antécédents médicaux.
"Je n'ai aucun élément sur ma mère. En cherchant, j'ai quand même retrouvé une femme qui l'a connue, et qui m'a dit qu'elle était d'origine kabyle, ce qui explique mes cheveux noirs. C'est très important pour moi", raconte-t-elle.
Outre les "X en colère", une petite dizaine d'associations soutient le projet de Mme Barèges, dont la Coordination des actions pour le droit aux origines (CADCO) ou Les mères de l'ombre (AMO).
L'association Enfance et Familles d'adoption (EFA) appelle quant à elle à la prudence, même si elle juge "intéressant" de réfléchir à une levée de l'anonymat, explique sa présidente d'honneur Janice Peyré. Mais "il aurait fallu l'insérer dans une réflexion globale sur l'accompagnement des femmes, puis de l'enfant quand il fait une demande d'accès aux origines", nuance-t-elle.
"L'enfant doit rester libre de ne pas connaître" ses origines, ajoute-t-elle.
"Les rencontres peuvent être très douloureuses", prévient Mme Peyré, estimant que les conditions d'une telle modification législative ne sont pas réunies.
Pour le pédo-psychiatre Pierre Lévy-Soussan, cette tentative de lever l'anonymat "va à l'encontre de l'intérêt de l'enfant et des mères".
En obligeant les femmes à laisser leur nom, "on les persécute au lieu de les accueillir dans leur détresse", s'alarme-t-il.
"On va assister à une baisse du nombre de femmes qui accouchent sous le secret" et les enfants, pour le coup, n'auront plus aucun élément sur leur mère biologique, prévient le médecin.
Or plus qu'un nom, "ce qui est important pour la structuration d'un enfant, c'est une histoire", souligne-t-il.
La proposition de Mme Barèges répond, selon lui, à une "logique militante", celles "d'adultes en souffrance qui vont décider quel est l'intérêt d'enfants à venir".
Le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (Cnaop) a reçu moins de 5.000 demandes depuis sa création en 2002.
A la publication du rapport de Mme Barèges, le Planning familial s'était dit "extrêmement inquiet" pour l'accouchement sous X, qui permet de "respecter la volonté de la mère, sans nier les attentes de l'enfant".