Ouille !
Déconvenue
Migrants en Albanie : la justice italienne inflige un nouveau revers à la politique migratoire de Meloni
La justice italienne a estimé ce lundi 11 novembre qu’il était préférable de se tourner vers la Cour de Justice de l’Union européenne pour s’assurer que la politique migratoire de la Première ministre était conforme aux textes européens.
Sept migrants transférés en Albanie doivent donc retourner en Italie.
Enième camouflet pour Giorgia Meloni. Un tribunal de Rome a infligé ce lundi 11 novembre un nouveau revers à la politique migratoire de la Première ministre italienne en demandant à la justice européenne de statuer sur la rétention de migrants transférés en Albanie, lesquels, en attendant, reviendront en Italie. Les magistrats ont décidé de saisir la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) pour s’assurer que la législation italienne soit conforme aux textes européens. Pour des questions de délai légal, les sept migrants concernés - de nationalités égyptienne et bangladaise - «retourneront en Italie dans les prochaines heures», explique une source gouvernementale italienne.
Le vice-Premier ministre Matteo Salvini, allié de Meloni et chef du parti antimigrants la Lega, a aussitôt réagi à cette décision en dénonçant «un nouveau jugement politique […] contre les Italiens et leur sécurité». «Le gouvernement et le parlement ont le droit de réagir pour protéger les citoyens et ils le feront». «La justice démonte encore une fois la propagande du gouvernement italien», s’est félicitée de son côté l’ONG de sauvetage en mer de migrants Sea-Watch. «Combien de temps encore le gouvernement italien continuera cette farce inhumaine ?»
Des centres vides
Alors que Rome a déjà dépensé des dizaines de millions d’euros pour construire ces centres de rétention en Albanie ayant finalement ouvert en octobre avec des mois de retard, ce nouveau revers est embarrassant pour Giorgia Meloni. La cheffe du parti post-fasciste Fratelli d’Italia avait présenté ce projet comme un «exemple» pour les autres pays européens.
Ces centres, initialement prévus pour accueillir des centaines de migrants, sont pour l’instant condamnés à tourner à vide.
Dans une affaire précédente remontant à trois semaines, des juges de la section des affaires migratoires du tribunal de Rome avaient annulé la rétention des 12 premiers migrants conduits en Albanie, invoquant un récent arrêt de la CJUE sur les pays de provenance considérés «sûrs» par les pays d’accueil. Le tribunal avait tranché qu’aux termes de cet arrêt, les 12 migrants ne remplissaient pas les critères de rétention en Albanie et qu’ils devaient être renvoyés en Italie. Alors que le droit européen prime sur le droit national, les juges italiens avaient invoqué cette décision stipulant que les Etats membres ne peuvent désigner comme «sûrs» que des pays entiers, et non certaines régions de ces pays.
Tentative de contournement d’obstacle
Pour contourner l’obstacle, le gouvernement de Giorgia Meloni avait adopté 48 heures plus tard un décret en inscrivant dans la loi 19 pays considérés comme «sûrs» par le gouvernement. Rome espérait ainsi traiter en procédure accélérée depuis l’Albanie, les demandes d’asile de migrants originaires de ces pays, avec à la clé une probable expulsion. Face à ce décret, des juges du tribunal de Bologne se sont déjà adressés il y a deux semaines à la CJUE lui demandant de clarifier la situation face aux «divergences évidentes» et aux «conflits d’interprétation» dans le système juridique italien.
Ils ont également estimé qu’il n’était pas possible de déclarer des pays entiers sûrs lorsqu’il existe des preuves de la persécution de minorités. «On pourrait dire, paradoxalement, que l’Allemagne nazie était un pays extrêmement sûr pour la grande majorité de la population allemande : à l’exception des juifs, des homosexuels, des opposants politiques, des personnes d’origine rom et d’autres groupes minoritaires», ont-ils plaidé.
Signé fin 2023 par Meloni et son homologue albanais, Edi Rama, l’accord entre Rome et Tirana, a une durée de cinq ans et concerne les hommes adultes interceptés par la marine ou les garde-côtes italiens dans leur zone de recherche et de sauvetage dans les eaux internationales. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, 58 504 migrants sont arrivés en Italie entre le 1er janvier et le 11 novembre 2024, contre 146 868 sur la même période en 2023.
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