l 'efficacité des substituts nicotiniques en question
Posté : 11 janvier 2012 00:27
Quand les douze coups de minuit ont sonné le soir du 31 décembre, nombreux ont été ceux qui se sont promis d'arrêter de fumer en 2012. Et parmi les coups de pouce utilisés pour décrocher de cette mauvaise habitude, les substituts nicotiniques (patches, chewing-gum, sprays) ont bonne place. Mais une étude publiée lundi sur le site de la revue Tobacco Control remet en cause leur efficacité. Selon les travaux de chercheurs de l'Ecole de santé publique d'Harvard (HSPH) aux États-Unis, ces produits n'augmentent pas les chances d'arrêter la cigarette à long-terme, même si on les associe à un suivi médical.
L'équipe du Dr Gregory Connolly, directeur du Centre de contrôle du tabac à la HSPH, s'est intéressé à près de 800 personnes qui venaient d'arrêter de fumer. Celles-ci ont été interrogées à trois reprises, en 2001-2002, 2003-2004, et 2005-2006 sur leurs habitudes: avaient-elles pris des substituts nicotiniques, sous quelle forme, pendant combien de temps? Avaient-elles consulté un médecin ou s'étaient-elles inscrites à un programme particulier pour arrêter de fumer?
«Arrêter de fumer peut parfois prendre des années»
A chaque session, un tiers des volontaires avait repris la cigarette, sans différence notable entre ceux ayant utilisé des substituts pendant plus de 6 semaines et les autres, avec ou sans l'aide d'un professionnel. «Cette étude montre que les substituts nicotiniques ne sont pas plus efficaces pour aider les gens à cesser de fumer à long terme», analyse le premier auteur de l'étude, Hillel Aplert. Et même si de précédentes études cliniques avaient conclu à l'efficacité de ces produits, celle-ci montre que la réalité empirique est autre, estime-t-il. «Nous espérions de tout autres résultats, confirme pour sa part le Dr Gregory Connolly, co-auteur de l'article. J'ai moi-même dirigé un programme basé sur ces traitements pendant des années, et investi des millions de dollars dedans».
Selon le Pr Yves Martinet, pneumologue au CHU de Nancy et président du Comité national contre le tabagisme, ces produits peuvent au contraire aider le patient s'ils s'accompagnent d'un suivi long et régulier du patient. «Quand ils sont bien prescrits, les substituts multiplient par deux les chances de succès», affirme-t-il, s'appuyant sur des données publiées par la revue Cochrane, basées sur des cohortes plus larges. «Mais quand les gens les achètent seuls sans ordonnance, ils ont tendance à ne pas en prendre assez et assez longtemps. Rompre sa dépendance au tabac peut prendre des mois, voire des années. Je connais des patients qui prennent des substituts depuis deux ou trois ans.» Ce spécialiste recommande de varier les formes de ces produits (patches, formes orales) et de les associer à une thérapie cognitivo-comportementale. Conduite avec un médecin généraliste ou un tabacologue, elle permettra de comprendre pourquoi le fumeur a recours à la cigarette et de définir une stratégie personnalisée.