Longuet chahuté par des rapatriés d'Algérie
Posté : 29 janvier 2012 17:10
Le ministre de la Défense Gérard Longuet a affronté dimanche à Perpignan la colère des rapatriés d'Algérie contre 50 ans de politique gouvernementale, augure d'un âpre combat entre UMP et Front national pour le vote d'un groupe largement acquis à la droite et l'extrême droite.
M. Longuet avait fait le voyage pour inaugurer un centre dédié à la présence des Français en Algérie de 1830 à 1962 et délivrer un message du président Nicolas Sarkozy à plusieurs centaines de rapatriés réunis en congrès.
La présidente du Front national Marine Le Pen tenait meeting le même jour à Perpignan pour parler d'emploi dans l'une des grandes villes les plus pauvres de France. Une pure coïncidence selon le Front national, en cette année à la fois de présidentielle et de 50ème anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie.
M. Longuet a essuyé cris et sifflets quand il a cité le nom du général de Gaulle, homme des accords d'Evian, avec celui du chancelier allemand Konrad Adenauer pour dire la nécessité d'une réconciliation franco-algérienne comme il y eut une réconciliation franco-allemande.
Haussant la voix sans se démonter, il a aussi provoqué de vives protestations quand il a évoqué le message qu'il s'apprêtait à lire de la part de M. Sarkozy, accusé par nombre de pieds-noirs et de harkis d'avoir, comme ses prédécesseurs, manqué à ses promesses à leur endroit.
Une fois lu, le message de M. Sarkozy a été largement applaudi.
"Je vous affirme que cette année 2012, cinquantenaire de la fin de la guerre d'Algérie, sera l'année du souvenir et du recueillement, et sûrement pas celle de la repentance", dit M. Sarkozy dans son message.
"Les hommes et les femmes qui sont partis s'installer en Afrique du Nord (...), loin d'être frappés d'opprobre, méritent notre reconnaissance. En développant l'économie de ces nouveaux territoires, ils ont œuvré à la grandeur de la France", dit-il.
M. Sarkozy exclut dans son message que le 19 mars 1962, date du cessez-le-feu, devienne une journée officielle de commémoration, comme le voudrait la Fnaca, grande organisation d'anciens combattants. Cette date symbolise pour une grande partie des rapatriés l'exode de centaines de milliers d'entre eux et le début des représailles et des massacres contre les Français et les harkis.
M. Longuet a regagné les faveurs du public en évoquant la nécessité que "nos compatriotes de métropole sachent ce qu'a été cette formidable aventure" de la présence française en Algérie. Mais c'est quand il a reconnu que la France n'avait pas tenu la parole faite aux rapatriés qu'il s'est attiré une ovation.
Le message de M. Sarkozy "ne répond pas aux attentes" des pieds-noirs et des harkis, a dit après coup Thierry Rolando, président du Cercle algérianiste, l'organisation qui tenait congrès à Perpignan et que ses détracteurs taxent de nostalgique de l'Algérie française.
Les rapatriés réclament non seulement la reconnaissance de leurs souffrances, mais celle de sa responsabilité par l’État français, sans parler de l'Etat algérien, a-t-il dit.
Or, depuis le discours prononcé par M. Sarkozy à leur attention à Toulon le 7 février 2007, "le message, en cinq ans, n'a pas été délivré", a dit M. Rolando.
M. Sarkozy dit dans son message qu'il s'adressera directement aux rapatriés au cours d'un déplacement dans quelques semaines.
Mais le Front national se pose en meilleur garant de la défense des rapatriés. Mme Le Pen leur avait quasiment réservé sa rentrée politique en août non loin de Perpignan quand elle s'était engagée, si elle était élue, à solder l'héritage de la guerre d'Algérie.
Selon une analyse récente de l'Ifop, Mme Le Pen recueille 28% d'intentions de vote chez les pieds-noirs, 8,5% de plus que sur l'ensemble des électeurs. En Languedoc-Roussillon ou en Provence-Alpes-Côte-d'Azur où ils sont nombreux, Mme Le Pen ferait 30% des voix chez les pieds-noirs et leurs descendants