on va lutter contre l'usurpation d'identité
Posté : 06 mars 2012 10:05
Le Parlement adoptera définitivement, ce mardi, par un vote de l'Assemblée, la proposition de loi visant à lutter contre les usurpations d'identité en instaurant un mégafichier des données biométriques de tous les Français, et dont les députés ont débattu fin février.
L'objet principal de cette proposition de loi est la mise en place d'une carte d'identité biométrique qui sera adossée à un fichier centralisé afin de lutter contre le phénomène d'usurpations d'identité qui touchent plusieurs milliers de personnes par an. Au cours de la discussion, la cinquième que l'Assemblée consacrait au sujet, Eric Ciotti (UMP) a cité un chiffre de l'Observatoire national de la délinquance donnant plus de 52.000 signalements d'usurpation d'identité entre 2005 et 2010, soit, a-t-il dit, une augmentation de 110% en 5 ans.
Une carte avec deux puces
La nouvelle carte d'identité sera munie de deux puces électroniques: la première contiendra toutes les données biométriques d'un individu (état civil, adresse, taille, couleur des yeux, empreintes digitales etc.), la seconde, facultative, servira de signature électronique sur Internet pour des échanges commerciaux et administratifs.
La proposition, présentée à l'origine en juillet 2010 par les sénateurs UMP, Jean-René Lecerf et Michel Houel, a fait l'objet d'un bras de fer entre le Sénat, toutes tendances confondues, et la majorité de droite de l'Assemblée nationale et donné lieu à de nombreuses navettes. Le litige entre le Sénat et la majorité à l'Assemblée résidait sur la nature du lien à apporter entre les données biométriques inscrites sur la nouvelle carte d'identité d'un individu et celles centralisées dans un fichier général de tous les Français.
«Lien fort» pour l'Assemblée, risques pour le Sénat
L’Assemblée nationale, soutenue par le gouvernement, n'a cessé d'opter pour un «lien fort»: les données recueillies sur le terrain peuvent être mises en correspondance avec celles d'un seul individu du fichier. Tandis que le Sénat, brandissant les risques que ferait courir un fichier généralisé aux libertés publiques, défendait un «lien faible»: à une empreinte d'un individu correspond non pas une seule identité mais un ensemble d'identités d'un sous-groupe d'individus du fichier. Il serait ainsi possible de mettre à jour l'usurpation d'identité, sans toutefois connaître l'auteur de l'infraction.
Mercredi, le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a, une fois de plus, demandé de faire «le choix de l'efficacité»: «contre l'usurpation d'identité, le lien faible n'est qu'un pétard mouillé», a-t-il dit, alors qu'«à l'inverse, le lien fort permet de remonter jusqu'à l'usurpateur via ses empreintes».
Il a assuré que tous les éléments de sécurité juridique étaient réunis, citant notamment «l'interdiction de croiser cette base avec les autres fichiers», et la limitation à «trois cas de l'autorisation de remonter des empreintes à l'identité»: délivrance ou renouvellement du titre, infraction pour usurpation d'identité et identification de victimes d'accidents collectifs ou de catastrophes naturelles.
«Qu'adviendra-t-il si des pirates s'emparent de ce fichier à données biométriques?»
Pour le PS, Jean-Jacques Urvoas a mis en garde contre la création de ce mégafichier qui «concernera 60 millions de Français». «Qu'adviendra-t-il si des pirates s'emparent de ce fichier à données biométriques?», a-t-il lancé remarquant que «tout détournement ou mauvais usage de ces données fait peser un risque majeur sur l'identité de la personne concernée».
De même, il a fait état «des inquiétudes de la Cnil» (Commission nationale informatique et liberté), «hostile à la création de la base de données biométriques telle que vous l'envisagez». Serge Blisko a pour sa part reproché à Claude Guéant de ne pas «oser employer le terme "fichier", préférant parler de "base"», un terme «hypocrite» a-t-il dit. Pour le Nouveau Centre, Pascal Brindeau a salué un texte qui fait «le choix de l'efficacité et de l'équilibre».