La France peut-elle diminuer unilatéralement sa contribution à l’UE de 1 milliard d’euros comme le demande Marine Le Pen
Posté : 30 novembre 2024 07:44
Les exigences de la maître chanteuse avant censure.
La présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée, qui menace le gouvernement de censure, demande à Michel Barnier de réaliser des économies sur ces 27 milliards d’euros annuels. Une idée qui n’est pas nouvelle dans le parti d’extrême droite, et à peu près infaisable en pratique.
Lignes rouges, lignes rouges, lignes rouges : l’expression est omniprésente dans la bouche des députés du Rassemblement national (RN), qui menacent de voter la censure du gouvernement Barnier si les exigences du parti d’extrême droite – actuellement examinés au Parlement – ne sont pas reprises dans les budgets de l’Etat et de la Sécurité sociale pour 2025. Mais comment financer l’abandon de certaines mesures proposées par le gouvernement, tout en partageant son objectif affiché de résorber le déficit ? La présidente des députés RN a listé ce vendredi 29 novembre sur X une série de propositions de recettes supplémentaires et d’économies. Parmi elles, la baisse de la contribution nette de la France à l’Union européenne de 1 milliard d’euros.
Les contributions des Etats membres sont la principale source de financement de l’UE. En 2023, sur un budget total de 168,6 milliards d’euros, environ 147 milliards provenaient de ces contributions nationales. Celles-ci sont majoritairement calculées à partir de la richesse de chaque Etat. En 2023, la France était le deuxième pays contributeur de l’UE avec 27,2 milliards d’euros versés, soit 18,5 % des contributions des Etats membres, derrière l’Allemagne (23,6 %) et devant l’Italie (12,8 %). Et s’ils sont ajustés chaque année, les budgets de l’UE sont surtout définis une fois tous les sept ans par le cadre financier pluriannuel (CFP).
«C’est vraiment du vent cette histoire»
Paris peut-il alors unilatéralement décider de réduire sa contribution ? «Non, ce n’est pas possible, on se mettrait en infraction par rapport aux traités et aux engagements européens», explique Olivier Costa, chercheur au CNRS et au Cevipof et spécialiste de l’Union européenne. En rognant unilatéralement sa contribution à l’UE, la France s’exposerait à des sanctions pécuniaires de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), ainsi qu’à de potentielles suspensions des droits de vote de la France dans les institutions de l’Union, explique le chercheur. «C’est vraiment du vent cette histoire, ça n’a aucun sens. Il y a une certaine somme qui est due, ça me semble compliqué de rogner là-dessus.»
La proposition de Marine Le Pen n’est pas nouvelle. Le 25 octobre, dans un hémicycle peu rempli, les députés du RN et UDR avaient pu faire adopter un amendement rabotant de 5 milliards d’euros l’enveloppe allouée par la France à l’Union européenne pour 2025, originellement de 23,3 milliards d’euros. Mais l’article et ce nouvel amendement ont ensuite été rejetés dans leur totalité par l’Assemblée nationale, avant que le texte ne soit envoyé au Sénat sans avoir pu être examiné complètement. L’enveloppe devrait finalement revenir à son budget initial à la faveur de la navette parlementaire et d’une éventuelle utilisation de l’article 49.3 de la Constitution par le gouvernement, qui permet à celui-ci d’engager sa responsabilité sur la version de son choix du texte en jeu.
Des rabais après négociation
Certains pays ont par le passé déjà obtenu des rabais. Le Royaume-Uni avec Margaret Thatcher, mais aussi plus récemment les Pays-Bas, la Suède, le Danemark, l’Autriche et l’Allemagne, qui ont obtenu plus de 7 milliards d’euros de ristournes annuelles pour la période 2021-2027 à l’issue d’un processus de négociation avec la Commission européenne. La décision n’a donc jamais été prise unilatéralement. Tout le contraire de ce que propose Marine Le Pen à Michel Barnier pour financer le budget 2025, alors qu’une négociation de la France avec l’Union européenne dans les trois prochaines semaines est tout simplement impensable.
Lors des élections européennes de 2024, le RN avait déjà défendu une baisse de la contribution française au budget communautaire, sans en préciser le montant et tout en assurant que la France continuerait de toucher les mêmes aides de la politique agricole commune (PAC), dont elle est de loin est la première bénéficiaire (9,5 milliards d’euros d’aides). Lors de l’élection présidentielle de 2022, le programme de Marine Le Pen prévoyait une baisse de 5 milliards d’euros de la contribution de la France au budget européen. Un tel procédé «n’est jamais arrivé, cela déclencherait une procédure d’infraction. Ces mesures sont à même de remettre en cause l’appartenance de la France à l’Union européenne», expliquait alors à Libération Eulalia Rubia, chercheuse à l’institut Jacques-Delors et spécialiste de l’UE. Une analyse que partage Olivier Costa : «A partir du moment où les uns et les autres ne respectent plus leurs engagements réciproques, le système ne peut plus fonctionner, cela signifierait la fin de l’UE tout simplement.»
https://www.liberation.fr/politique/la- ... U4GHLHNWM/
La présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée, qui menace le gouvernement de censure, demande à Michel Barnier de réaliser des économies sur ces 27 milliards d’euros annuels. Une idée qui n’est pas nouvelle dans le parti d’extrême droite, et à peu près infaisable en pratique.
Lignes rouges, lignes rouges, lignes rouges : l’expression est omniprésente dans la bouche des députés du Rassemblement national (RN), qui menacent de voter la censure du gouvernement Barnier si les exigences du parti d’extrême droite – actuellement examinés au Parlement – ne sont pas reprises dans les budgets de l’Etat et de la Sécurité sociale pour 2025. Mais comment financer l’abandon de certaines mesures proposées par le gouvernement, tout en partageant son objectif affiché de résorber le déficit ? La présidente des députés RN a listé ce vendredi 29 novembre sur X une série de propositions de recettes supplémentaires et d’économies. Parmi elles, la baisse de la contribution nette de la France à l’Union européenne de 1 milliard d’euros.
Les contributions des Etats membres sont la principale source de financement de l’UE. En 2023, sur un budget total de 168,6 milliards d’euros, environ 147 milliards provenaient de ces contributions nationales. Celles-ci sont majoritairement calculées à partir de la richesse de chaque Etat. En 2023, la France était le deuxième pays contributeur de l’UE avec 27,2 milliards d’euros versés, soit 18,5 % des contributions des Etats membres, derrière l’Allemagne (23,6 %) et devant l’Italie (12,8 %). Et s’ils sont ajustés chaque année, les budgets de l’UE sont surtout définis une fois tous les sept ans par le cadre financier pluriannuel (CFP).
«C’est vraiment du vent cette histoire»
Paris peut-il alors unilatéralement décider de réduire sa contribution ? «Non, ce n’est pas possible, on se mettrait en infraction par rapport aux traités et aux engagements européens», explique Olivier Costa, chercheur au CNRS et au Cevipof et spécialiste de l’Union européenne. En rognant unilatéralement sa contribution à l’UE, la France s’exposerait à des sanctions pécuniaires de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), ainsi qu’à de potentielles suspensions des droits de vote de la France dans les institutions de l’Union, explique le chercheur. «C’est vraiment du vent cette histoire, ça n’a aucun sens. Il y a une certaine somme qui est due, ça me semble compliqué de rogner là-dessus.»
La proposition de Marine Le Pen n’est pas nouvelle. Le 25 octobre, dans un hémicycle peu rempli, les députés du RN et UDR avaient pu faire adopter un amendement rabotant de 5 milliards d’euros l’enveloppe allouée par la France à l’Union européenne pour 2025, originellement de 23,3 milliards d’euros. Mais l’article et ce nouvel amendement ont ensuite été rejetés dans leur totalité par l’Assemblée nationale, avant que le texte ne soit envoyé au Sénat sans avoir pu être examiné complètement. L’enveloppe devrait finalement revenir à son budget initial à la faveur de la navette parlementaire et d’une éventuelle utilisation de l’article 49.3 de la Constitution par le gouvernement, qui permet à celui-ci d’engager sa responsabilité sur la version de son choix du texte en jeu.
Des rabais après négociation
Certains pays ont par le passé déjà obtenu des rabais. Le Royaume-Uni avec Margaret Thatcher, mais aussi plus récemment les Pays-Bas, la Suède, le Danemark, l’Autriche et l’Allemagne, qui ont obtenu plus de 7 milliards d’euros de ristournes annuelles pour la période 2021-2027 à l’issue d’un processus de négociation avec la Commission européenne. La décision n’a donc jamais été prise unilatéralement. Tout le contraire de ce que propose Marine Le Pen à Michel Barnier pour financer le budget 2025, alors qu’une négociation de la France avec l’Union européenne dans les trois prochaines semaines est tout simplement impensable.
Lors des élections européennes de 2024, le RN avait déjà défendu une baisse de la contribution française au budget communautaire, sans en préciser le montant et tout en assurant que la France continuerait de toucher les mêmes aides de la politique agricole commune (PAC), dont elle est de loin est la première bénéficiaire (9,5 milliards d’euros d’aides). Lors de l’élection présidentielle de 2022, le programme de Marine Le Pen prévoyait une baisse de 5 milliards d’euros de la contribution de la France au budget européen. Un tel procédé «n’est jamais arrivé, cela déclencherait une procédure d’infraction. Ces mesures sont à même de remettre en cause l’appartenance de la France à l’Union européenne», expliquait alors à Libération Eulalia Rubia, chercheuse à l’institut Jacques-Delors et spécialiste de l’UE. Une analyse que partage Olivier Costa : «A partir du moment où les uns et les autres ne respectent plus leurs engagements réciproques, le système ne peut plus fonctionner, cela signifierait la fin de l’UE tout simplement.»
https://www.liberation.fr/politique/la- ... U4GHLHNWM/