Fusion Honda - Nissan. Conséquences pour Renault
Posté : 24 décembre 2024 00:03
Automobile : Honda et Nissan ouvrent des négociations en vue d’une fusion
Une méga-fusion de Nissan et Honda rebattrait-elle les cartes du marché automobile?
Mitsubishi Motors, dont Nissan est le principal actionnaire, devra déterminer d’ici «fin janvier» s’il entend intégrer cette nouvelle alliance industrielle.
Le géant japonais de l’automobile Honda et son compatriote en difficulté Nissan se sont entendus pour ouvrir des négociations en vue d’une fusion susceptible de donner naissance au numéro trois mondial du secteur, a indiqué Nissan dans un communiqué. Mitsubishi Motors, dont Nissan est le principal actionnaire, devra déterminer d’ici «fin janvier» s’il entend intégrer cette nouvelle alliance industrielle.
Une méga-fusion de Nissan et Honda rebattrait-elle les cartes du marché automobile?
Voilà notre Renault presque orphelin de Nissan, et qui va devenir un acteur local concentré sur l'UE et le pourtour méditerranéen, plus l'Amérique du Sud. On s'attendait à un coup de Nissan depuis l'affaire Ghosn à vrai dire, laquelle était juste un symptôme d'un malaise entre Nissan et Renault, et entre Tokyo et Paris. Je note aussi que le mariage Nissan-Honda ne règle aucun problème côté Japon, les 2 groupes souffrent des mêmes maux.Nissan et Honda sont, comme leurs concurrents japonais, en première ligne devant la vague « sino-électrique » qui déferle sur leurs marchés historiques. En Chine et en Asie du Sud-Est, des zones qui étaient hier leur Eldorado, ils regardent comme le lapin dans la lumière des phares des nouveaux acteurs, inconnus il y a encore cinq ans, les déloger avec méthode. En Chine, 60 % des véhicules vendus cette année sont de marques locales, et la moitié sont électriques – segment où les Japonais demeurent absents. Dans les pays frontaliers d’Asie, jadis chasse gardée nippone, la classe moyenne imite celle de son voisin chinois et roule de plus en plus en BYD, Changan, Geely, Chery, Nio et Saic, des véhicules vendus à des prix défiant toute concurrence japonaise.
Sans parler de l’Europe, où Honda et Nissan ont une empreinte faible, et qui craint à son tour la menace d’une déferlante chinoise. Aux États-Unis enfin, Nissan et Honda voient leurs parts de marché régulièrement s’effriter, même si les acteurs chinois sont ralentis par les barrières d’accès mises en place par les autorités. La situation américaine est particulièrement critique pour Nissan, qui manque de modèles hybrides, actuellement très populaires, dans son catalogue. « Nous sommes en train d’introduire des modèles hybrides aux États-Unis, mais pas assez vite », avait reconnu le directeur général du groupe, Makoto Uchida, en annonçant un plan ambitieux de suppressions d’emplois début novembre. Mercredi, la Bourse de Tokyo ne s’y est pas trompée : le titre de Nissan a flambé (+ 23 %), tandis que celui de Honda calait (- 3 %) après la publication de l’article du Nikkei.
Rivalité historique entre les deux groupes
Cette éventualité de rapprochement a immédiatement fait naître une question dans la tête des analystes du secteur : une fusion pour quoi faire ? Avec des volumes similaires (4,2 millions de véhicules pour Honda, 3,4 millions pour Nissan en 2023), les deux comparses pourraient certes réaliser des économies d’échelle pour leurs achats et leur recherche-développement. Ils ont du reste déjà annoncé un partenariat pour développer des moteurs électriques ensemble. Mais les synergies font long feu, explique un fin connaisseur de la direction de Nissan : « Honda et Nissan occupent les mêmes marchés et ont les mêmes problèmes. Ce n’est pas leur fusion qui va les résoudre », tranche-t-il.
Pour ce dernier, le moment est particulièrement incongru : Makoto Uchida a présenté en mars un plan de restructuration ambitieux et de longue haleine baptisé Arc censé remettre Nissan sur les rails. Ce dernier prévoit de lancer trente modèles en environ trois ans, conçus pour concurrencer notamment ceux de… Honda. Historiquement, la rivalité des ingénieurs des deux groupes est légendaire : Soichiro Honda, fondateur du constructeur éponyme, avait imposé son expansion internationale contre les vœux du ministère de l’Industrie (Miti) qui, dans les années 1960, ne soutenait que les ambitions de Toyota et de… Nissan. La semaine dernière encore, Nissan a annoncé une refonte profonde de son équipe dirigeante.
Alors, pourquoi cette accélération ? Mercredi soir, les médias locaux affirmaient que c’était un acteur non pas chinois, ou américain, mais taïwanais qui forçait peut-être les deux constructeurs à accélérer leur rapprochement. Le groupe industriel Foxconn aurait travaillé en coulisses à acquérir une participation dans le capital de Nissan, dont le cours de l’action s’est effondré cette année (- 40 %). Le groupe, spécialiste de la sous-traitrance pour la fine fleur de l’électronique grand public de la planète (iPhone, téléviseurs…), veut devenir un constructeur automobile électrique. Il a déjà racheté le groupe électronique Sharp en 2016.
Renault concerné
Jusqu’où iront les deux constructeurs ? Selon nos informations, le conseil d’administration n’est pas tenu au courant des négociations en cours - et, partant, Renault, partenaire d’hier dans l’Alliance. Ce dernier a un intérêt direct dans ces négociations. En novembre 2023, le groupe français avait transféré 28,4 % de sa participation dans Nissan dans un fonds de défaisance, dont il a déjà vendu, en trois fois, environ 10 % (dont 5 % fin septembre). Les deux constructeurs, français et japonais, conservent à leur disposition 15 % du capital de leur partenaire.
Dernier à s’inviter : Carlos Ghosn. Exilé au Liban depuis sa rocambolesque fuite du Japon après son arrestation début 2019, l’ancien leader tout-puissant de l’Alliance donnera une visioconférence de presse au club des correspondants étrangers du Japon lundi prochain.