Pourquoi les Suisses ne veulent-ils plus acheter de F-35?
Ils sont 81% à refuser l’achat des avions de combat américains, selon un sondage réalisé par nos confrères de Watson. Mais c’est quoi le problème avec les F-35?
Ils sont 81% à refuser l’achat des avions de combat américains, selon un sondage réalisé par nos confrères de Watson, en collaboration avec l’institut de recherche sociale Demoscope. En Suisse romande, le chiffre est encore plus élevé que dans le reste de la Suisse, avec 87% des sondés opposés à l’achat des F-35. Par ailleurs, la question de l’affiliation politique a été posée aux sondés. Et à gauche comme à droite, on s’oppose majoritairement à l’achat des avions américains. Même si ce sont les électeurs PLR qui se sont le plus prononcés pour le maintien de l’achat des avions, à 37%. Contre seulement 4% pour Les Vert·e·s.
Mais c’est quoi le problème avec les F-35?
En fait, il y en a plusieurs. On vous les résume en trois points.
1. Le prix. Il s’agit du plus gros contrat d’armement de l’histoire helvétique pour un coût d’un peu plus de 5 milliards de francs suisses. Mais il risque de coûter encore plus cher que prévu. Selon des chiffres obtenus par la NZZ, l’acquisition d’un F-35 du constructeur Lockheed Martin pourrait coûter jusqu’à 20% de plus d’ici à 2029. L’une des raisons à cette augmentation est, entre autres, l’inflation, alors que le contrat avait été signé en 2022. Mais qui paiera la différence?
2. Le problème de la souveraineté. Avec ce contrat, la Suisse mise entièrement sur les Etats-Unis pour la défense de son espace aérien, qui comprend 36 F-35A mais aussi des systèmes Patriot. Et puis il y a une autre question qui est ressortie dernièrement: est-ce qu’il existe un kill switch américain qui permettrait d’éteindre tous les avions de chasse? Concrètement, non. Mais les jets dépendent de systèmes américains que les Etats-Unis pourraient ne plus fournir, limitant ainsi les capacités des avions. Il en va de même pour les mises à jour des F-35, critiques pour faire face aux technologies d’adversaires. Sans oublier la question de la protection des données militaires suisses.
3. Donald Trump. Notre dépendance à l’armement américain nous rend vulnérables à des négociations au prix fort de Donald Trump, qui s’en prend violemment à ses alliés européens depuis le début de son mandat.
Les personnes qui se sont prononcées en faveur de l’achat des F-35 souhaitent avant tout honorer le contrat qui a été signé. Pour rappel, le peuple, en 2020, s’est prononcé à 50,1% en faveur de l’achat d’avions de combat pour un budget de 6 milliards de francs suisses. Mais c’est le Conseil fédéral qui a choisi d’aller de l’avant avec le modèle de Lockheed Martin en 2022, alors que Viola Amherd était à la tête du Département fédéral de la défense (DDPS). La décision se jouait à l’époque principalement entre les Rafale français et l’Eurofighter, deux avions qui auraient permis au passage d’apaiser les tensions entre la Suisse et ses voisins européens. Mais c’est finalement le F-35 qui a été choisi pour des raisons de coûts, de technologie et d’interopérabilité avec d’autres systèmes.
Le Canada, par exemple, songe déjà à renoncer à sa commande de F-35. Le Portugal, qui prévoyait aussi de s’équiper de ces jets, pourrait finalement se tourner vers les Européens. Alors on pourrait également imaginer le Conseil fédéral se tourner vers un autre constructeur. Mais deux questions importantes devraient alors se poser: que coûterait l’annulation du contrat en cours avec Lockheed Martin, politiquement et économiquement? Et combien de temps devrons-nous attendre de nouveaux avions?
https://www.letemps.ch/videos/actualite ... er-de-f-35