Anne32 a écrit :
Quo vadis aurait peut être préféré que nous fassions comme les Américains avec les Indiens, ou les Australiens avec les aborigènes.
Extermination pratiquement totale, en ne gardant que quelques figurants pour des western
Au lieu de ça, la population autochtone, en Algérie, est passée entre 1830 et 1962 de 1 million à 10
Cherchez l'erreur......
Mais ça,faut pas l'évoquer, ce n'est pas dans le politiquement correct.....
En 1832 le Duc de Rovigo lance contre les Ouffas une attaque au cours de laquelle « tout ce qui y vivait fut voué à la mort » :
« En revenant de cette funeste expédition, racontera le colonel Pélissier de Reynaud, plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances et une d'elles servit, dit-on, à un horrible festin.
» Simple dérapage d'un colonel français, ou massacre prémédité ? « Des têtes. Apportez des têtes, aurait demandé à l'époque le gouverneur d'Alger. Bouchez les conduites d'eau crevées avec la tête d'un Bédouin que vous rencontrerez. »
Bilan, « il y eut douze mille morts chez les Ouffas. On trouva, les jours suivants, bracelets et boucles d'oreilles en abondance au marché algérois de Bab-Azoun.
Dès lors, et jusqu'en 1848, les troupes françaises engagées dans la conquête de l'Algérie multiplient les expéditions meurtrières.
En 1834, une mission parlementaire dresse à son retour d'Algérie un sévère bilan de la conquête : « En un mot, nous avons débordé en barbarie les barbares que nous venions civiliser et nous nous plaignons de ne pas réussir auprès d'eux. » À partir de 1837 et l'arrivée de la Légion étrangère commandée par Achille de Saint-Arnaud sous la supervision du général Bugeaud, les massacres délibérés prennent une dimension effarante.
L'objectif affiché, que l'on n'hésiterait pas aujourd'hui à qualifier de génocidaire, est de réduire les effectifs des populations algériennes, pour permettre à la colonisation de prendre ses aises.
Pour Bugeaud, le but « n'est pas de courir après les Arabes, ce qui est fort inutile ; il est d'empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer, [...] de jouir de leurs champs ».
« Allez tous les ans leur brûler leurs récoltes (...), ou bien exterminez-les jusqu'au dernier » : cela s'appelle la razzia. Et la razzia devient bientôt routine : « Nous tombions sur une portion de la tribu des Garabas qui a été surprise, gobée, dévalisée : neuf cent quarante-trois boeufs, trois mille moutons et chèvres, trois cents ânes, soixante chevaux, trois mulets, vingt chameaux, force poules, beaucoup de tapis, des tentes, de l'orge, du blé, de l'argent, etc., sept femmes et quelques hommes (ceux qui n'ont pas pu se sauver ont été tués), je crois qu'il est difficile de faire razzia plus complète. […]
Tant mieux, c'est très amusant », écrit le lieutenant-colonel de Montagnac, un de ces nombreux militaires français arrivés en Algérie avec le grade de lieutenant et repartis une quinzaine d'années plus tard avec celui de général.
« Les femmes, les enfants accrochés dans les épaisses broussailles qu'ils sont obligés de traverser, se rendent à nous, continue de Montagnac. On tue, on égorge ; les cris des épouvantés, des mourants, se mêlent au bruit des bestiaux qui mugissent, bêlent de tous côtés...
Chaque soldat arrive avec quelques pauvres femmes ou enfants qu'il chasse, comme des bêtes, devant lui [...].
Vous me demandez ce que nous faisons des femmes que nous prenons. On en garde quelques-unes comme otages, les autres sont échangées contre des chevaux, et le reste est vendu, à l'enchère, comme bêtes de somme... Parmi ces femmes, il y en a souvent de très jolies »
« Jamais peut-être une occupation ne s'est faite avec autant de désordre, même dans les siècles les plus barbares », écrira Pélissier de Reynaud dans ses chroniques algériennes en 1839. De retour d'un voyage d'enquête en Algérie en 1841, Alexis de Tocqueville admettra :
« Nous faisons la guerre de façon beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes. […] C'est, quant à présent, de leur côté que la civilisation se rencontre. »
Février 1842, Tlemcen. Le lieutenant-colonel de Montagnac raconte l'ambiance qui règne dans un camp dressé par La Moricière, un officier polytechnicien connu pour avoir systématisé les massacres en les rebaptisant razzias, du nom de la pratique ancestrale de l'ennemi lui-même : « il y a partout un pied de neige, hommes et chevaux, tout est couvert d'un manteau de frimas ; l'aspect du bivouac a quelque chose de sinistre. On n'entend que le bêlement des moutons et les cris des quelques malheureux enfants que nous avons pris, et qui meurent de froid dans les bras de leurs mères. [...] À dix heures du matin, nous levons notre triste camp et nous nous dirigeons vers l'emplacement où, la veille, nous avions fait cette fameuse razzia et où nous avions trouvé plus de 6 000 têtes de bétail. Le terrain que nous parcourons est jonché de cadavres de chèvres, de moutons, morts de froid ; quelques hommes, femmes, enfants gisent dans les broussailles, morts ou mourants. [...] La Moricière profita de notre séjour à Frendah pour faire rechercher, par une colonne de quatre cents hommes, les bestiaux que nous avions laissés la veille ; cette colonne rencontra dans toutes les directions des cadavres d'hommes ; de femmes, d'enfants. Ces malheureux, après avoir épuisé toutes leurs facultés physiques, étaient tombés anéantis. Cette expédition, par un temps horrible, a eu des conséquences immenses pour l'accomplissement de notre oeuvre : toutes les fractions de tribus, et surtout la grande portion de Hachem, se sont rendues immédiatement. Il ne nous reste plus maintenant qu'à organiser ces nombreuses populations et à polir enfin l'oeuvre immense que nous venons de terminer dans l'espace de quatre mois d'hiver. » Suite à cette expédition, La Moricière recevra la Légion d'honneur. Commentaire du général de Martimprey : « Cette campagne peut être considérée comme la cause la plus efficace de la conquête ; elle comptera dans les plus belles pages des annales de l'armée française. »
« Toutes les populations qui n'acceptent pas nos conditions doivent être rasées », écrit le lieutenant-colonel de Montagnac en mars 1843. « Tout doit être pris, saccagé, sans distinction d'âge ni de sexe : l'herbe ne doit plus pousser où l'armée française a mis le pied. Qui veut la fin veut les moyens, quoi qu'en disent nos philanthropes. Tous les bons militaires que j'ai l'honneur de commander sont prévenus par moi-même que s'il leur arrive de m'amener un Arabe vivant, ils recevront une volée de coups de plat de sabre. [...] Voilà, mon brave ami, comment il faut faire la guerre aux Arabes :
tuer tous les hommes jusqu'à l'âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger des bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs ; en un mot, anéantir tout ce qui ne rampe pas devant nous comme des chiens. » Et les razzias redoublent de férocité...
Juillet 1845, Dahra, le long du littoral à l'ouest d'Alger, vers Ténès. Le général Bugeaud préconise d'agir sans ménagement avec les fuyards, hommes, femmes, enfants et troupeaux, qui se réfugient dans les cavernes : « Enfumez-les comme des renards ! » Le colonel Pélissier (à ne pas confondre avec Pélissier de Reynaud, cité précédemment) s'exécute. « "À bout de patience", face au "fanatisme sauvage de ces malheureux" qui exigent, pour sortir, que l'armée française s'éloigne, il fait mettre le feu à l'entrée des cavernes. Le matin, tout est consommé. Cinq cents victimes, dit le rapport officiel. Aux environs de mille, témoignera un officier espagnol présent », qui donnera une description détaillée du drame : « Rien ne pourrait donner idée de l'horrible spectacle que présentait la caverne. Tous les cadavres étaient nus, dans des positions qui indiquaient les convulsions qu'ils avaient dû éprouver avant d'expirer... Le sang leur sortait par la bouche. » Une partie de la population de la grotte est morte piétinée par les animaux affolés. Telle est l'oeuvre qui distinguera Pélissier, lequel dira :
« La peau d'un de mes tambours avait plus de prix que la peau de tous ces misérables. »
Pour Saint-Arnaud, l'essentiel est que « le colonel Pélissier et moi, nous étions chargés de soumettre le Dahra, et le Dahra est soumis ». D'ailleurs, il raconte lui-même sa propre « enfumade » des Sbéahs : « Alors je fais hermétiquement boucher toutes les issues et je fais un vaste cimetière. La terre couvrira à jamais les cadavres de ces fanatiques. [...] Personne que moi ne sait qu'il y a là-dessous cinq cents brigands qui n'égorgeront plus les Français. » Un mois plus tard : « Je n'ai pas encore tout à fait fini avec les Sbéahs, mais cela avance.
À la fin de l'expédition, j'aurai tué ou pris plus de deux mille Sbéahs. La tribu entière compte de dix à douze mille âmes. Et peut-être ne seront-ils pas corrigés ? »
En 1849, c'est la prise de l'oasis de Zaâtcha ; l'assaut se termine par un massacre général, qui donne lieu à des
« scènes déplorables »:
« Les zouaves, dans l'enivrement de leur victoire, se précipitaient avec fureur sur les malheureuses victimes qui n'avaient pu fuir. Ici, un soldat amputait, en plaisantant, le sein d'une pauvre femme, qui demandait comme une grâce d'être achevée et expirait quelques instants après dans les souffrances ; là un autre soldat prenait par les jambes un petit enfant et lui brisait la cervelle contre la muraille ; ailleurs, c'était d'autres scènes qu'un être dégradé peut seul comprendre et qu'une bouche honnête ne peut raconter », relate un témoin, Baudricour, tandis que le colonel Dumontel, parlant du même événement, ne fait pas dans la dentelle : « L'élan de nos soldats a été admirable. […] Le sévère châtiment infligé à cette oasis a produit un salutaire effet. »
Quelques années plus tard, prise de Laghouat, racontée par Eugène Fromentin, « jeune peintre et tendre écrivain », dans Un été dans le Sahara :
« Sur les deux mille et quelque cent cadavres que l'on releva les jours suivants, plus des deux tiers furent trouvés en ville... On marchait sur du sang ; les cadavres empêchaient de passer... On dit que pendant longtemps la ville sentit la mort ; et je ne suis pas sûr que l'odeur ait entièrement disparu... Quand on eut enfoui tous les morts, il ne resta plus personne dans la ville, exceptés les douze cents hommes de garnison. Les survivants avaient pris la fuite. Les chiens eux-mêmes, épouvantés, privés de leur maître, émigrèrent en masse et ne sont pas revenus. »
À l'issue de ces années d'horreur, l'Algérie a perdu le quart de sa population : de 1830 à 1849, sur une population estimée à
3 millions d'habitants à l'arrivée des Français, la conquête fait 700 000 morts. Au cours du siècle qui suit, jalonné de révoltes brutalement réprimées, la mémoire de cette guerre génocidaire restera inscrite dans les esprits de plusieurs générations.
1945-1962 : la « guerre contre-insurrectionnelle »
On peut considérer que la deuxième guerre d'Algérie commence véritablement en mai 1945, à Sétif. Ce jour-là, la population
« indigène » est autorisée à manifester pacifiquement pour célébrer la fin de la Seconde Guerre mondiale. Dans la foule, surgit soudain un drapeau algérien, furieuse, la police intervient pour s'en emparer, mais elle provoque une échauffourée. Une fusillade éclate. L'émeute se déchaîne, les manifestants s'en prennent aux Européens, à Sétif et dans plusieurs localités de la région. Bilan du côté des colons : cent deux (ou cent trois) tués, cent dix blessés .
La répression, conduite par l'armée française, mais aussi par des milices européennes déchaînées, sera d'une incroyable violence et fera des milliers de victimes : exécutions sommaires, massacres de civils, bombardements de mechtas par la Marine et l'aviation... Le bilan ne pourra jamais être établi. Selon l'historienne Annie Rey-Goldzeiguer, « la seule affirmation possible, c'est que le chiffre dépasse le centuple des pertes européennes et que reste, dans les mémoires de tous, le souvenir d'un massacre qui a marqué cette génération ».
Ce n'est donc pas un hasard si l'histoire semble se répéter dans la même région, en août 1955, dix mois après le déclenchement de la guerre d'indépendance. Comme dix ans plus tôt, la répression fut impitoyable. [...]
Des mechtas entières furent exterminées. Des centaines de gens furent enfermés au stade de Skikda où se produisirent des assassinats de masse. Des milices européennes surexcitées se livrèrent à la chasse à l'Arabe, en particulier lors des obsèques de soixante Européens à Skikda.
Le maire de Skikda, Benquet Crevaux, se vanta d'avoir tiré de son balcon sur tout passant qui n'était pas européen. [...] Un rapport militaire rapporte que soixante civils auraient été exécutés sans jugement à El-Kluoub et enterrés au lieu-dit Saroui. Un autre mentionne pour le seul secteur d'El-Harrouch sept cent cinquante morts. »
Bilan total : quelque 5 000 civils assassinés.
Janvier 1957, Kabylie. Récit de l'écrivain Mouloud Féraoun :
« Des viols systématiques sont commis aux Ouadhias. Les soldats ont eu quartier libre pour souiller, tuer, brûler. Après la mort du lieutenant Jacote, (...) le douar a été ratissé. Le premier village fut carrément vidé de ses habitants. Dans les autres villages, on a cueilli tous les hommes.
Les hommes ont été enfermés tous ensemble durant quinze jours.
On en a tué environ quatre-vingts, fusillés par petits paquets chaque soir. On faisait préparer les tombes à l'avance. Par ailleurs, après quinze jours, on a constaté que plus de cent autres avaient disparu. On suppose qu'ils ont été enfermés dans des gourbis pleins de paille et brûlés. Aucun gourbi, aucune meule ne subsiste dans les champs.
Les femmes sont restées dans les villages, chez elles. Ordre leur fut donné de laisser les portes ouvertes et de séjourner isolément dans les différentes pièces de chaque maison. Le douar fut donc transformé en un populeux BMC [bordel militaire de campagne] où furent lâchées les compagnies de chasseurs alpins ou autres légionnaires. »
Dans un documentaire de Patrick Rotman, diffusé sur France 3 en 2002, un ancien appelé confirme que la région des Ouadhias devint quelques jours durant un immense bordel. Pire : il révèle qu'un jour un soldat sort un nourrisson de son berceau et lui fracasse la tête en le projetant contre un mur. Poussé à la confidence, il avouera finalement être lui-même l'auteur de ce terrible geste...
Cette année 1957, Tahar Zbiri, officier de l'ALN,
fait état dans l'Aurès de « civils sommairement exécutés ou jetés dans le vide à bord d'hélicoptères ou du haut d'un ravin, de tortures collectives, de femmes mises à nu puis déchiquetées par des chiens excités par de sadiques paras à bannir du rang de l'humanité »
Ces évocations, écrit Gilbert Meynier, « concordent avec le célèbre article de Robert Bonnaud, paru en avril 1957 dans la revue Esprit, et intitulé "La paix des Nementchas" ». Dans le Nord-Constantinois, à Béni-Tlilane, « douar de 2 000 habitants, il y aurait eu près d'une centaine d'exécutions et l'oued aurait été teinté en rouge. Des hommes auraient été obligés de creuser leur tombe avant d'être abattus. D'autres auraient été enterrés vivants ou achevés à coups de hache ».