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Un certain mystère plane pourtant sur la naissance de ces groupes. Dans la plupart des cas, le nom de leur créateur n’est pas visible sur le réseau social – et dans les rares cas où il l’était, les intéressés, que nous avons contactés, n’ont pas souhaité répondre à nos questions. Les profils des administrateurs actuels des groupes sont, en revanche, systématiquement visibles, ce qui nous a permis d’échanger avec quatre d’entre eux. Mais, curieusement, aucun n’a pu ou voulu nous dire qui avait créé leur groupe au départ.
« Est-ce qu’il n’y a pas eu une grande manipulation derrière tout ça ? »
Avec le recul, certains s’interrogent. Au sein même de ces communautés, plusieurs administrateurs se demandent parfois s’il ne s’agirait pas là d’une action coordonnée de longue date. « C’est vrai que je me demande ce qu’il s’est réellement passé ? Est-ce qu’il n’y a pas eu une grande manipulation derrière tout ça ? », nous a ainsi dit Juliana R., qui a rejoint le mouvement en créant son propre groupe, « Citoyens en colère », le 10 octobre 2018, avant de s’investir dans l’organisation des « gilets jaunes » du Finistère.
Difficile, en effet, de savoir pour qui roule vraiment ce réseau. Frank Buhler, l’un des initiateurs des appels à manifester le 17 novembre, a, lui aussi, remarqué ce phénomène. Bon connaisseur des mouvances de droite et d’extrême droite en ligne, ce community manager et adhérent du parti Debout la France note que « ces communautés se sont agrégées aux “gilets jaunes” » et que « cela pouvait avoir l’air d’être une manière d’organiser des soutiens à un parti politique de manière masquée ».
Impossible, cependant, de les relier formellement à une formation politique : aucun de ces groupes n’appelle directement à soutenir qui que ce soit.
Les 80 km/h dans le viseur
Une chose est sûre : bien avant les prix des carburants, la « colère » aurait en fait visé l’abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires. « Les groupes Facebook “Colère” ont été créés pour protester contre ça », nous assure Jonathan Torres, de « Colère 72 », le plus suivi de tous avec près de 30 000 membres début avril 2019.
Un début de fronde s’enclenche, porté par des groupes d’automobilistes et de motards, mais aussi par une partie de la classe politique
A l’époque, une partie de la France est effectivement vent debout contre la mesure qu’Edouard Philippe vient d’annoncer pour l’été 2018. Un début de fronde s’enclenche, porté par des groupes d’automobilistes et de motards, mais aussi par une partie de la classe politique. Au premier rang, on trouve alors Marine Le Pen, qui s’insurge contre la « persécution des automobilistes » dès le 9 janvier 2018. Des actions de protestation s’organisent un peu partout en France, mais peinent à faire le plein.
Au fil des semaines, les groupes « Colère » basculent vers un ras-le-bol plus général. Ils restent cependant confidentiels jusqu’au mois d’octobre, où leur activité va se développer brusquement à l’avènement des « gilets jaunes ».
L'activité des groupes Facebook Colère a bondi en même temps que celle des "gilets jaunes"
Interactions (partages, commentaires et réactions) hebdomadaires au sein de 16 groupes Colère publics depuis mars 2018.
« Ainsi s'éteint la liberté, sous une pluie d'applaudissements. » Star Wars, épisode III
"nul bien sans peine".....