Cette fois, ça y est. Le gouvernement présente formellement son projet de loi de réforme des retraites en conseil des ministres, vendredi 24 janvier. L'étude d'impact qui accompagne le texte ne sera officiellement dévoilée que lors du dépôt devant l'Assemblée nationale, prévu le 17 février, mais Le Point a eu accès à une synthèse. Elle contredit l'argumentaire des syndicats opposés au système universel par points.
Le nouveau régime de retraite serait favorable aux plus aisés ? Faux, répond le gouvernement, chiffres à l'appui. L'écart entre les 10 % des retraités les plus aisés et les plus modestes va se réduire pour la génération née en 1980. Avec les règles actuelles, les premiers auraient touché 7,1 fois plus que les seconds. Avec la réforme, ce sera seulement 5,1 fois plus. Idem pour la génération née en 1990 : l'écart passera de 7,3 à 5,2.
L'augmentation du minimum de pension à 85 % du SMIC pour une carrière complète va jouer un rôle non négligeable dans la réduction des inégalités entre retraités, d'autant qu'il va être accordé, à terme, aux salariés rémunérés au smic à temps partiel à 80 %. En 2025, un salarié rémunéré au smic qui aura effectué une carrière complète de 43 ans aura droit à 1 147 euros de pension contre 1 082 euros dans le système actuel, soit un gain de 65 euros. Avec seulement 0,8 smic, il passera de 974 euros de pension à 1 066 euros. Les artisans et les agriculteurs sont aussi concernés. Pour ces derniers, la pension va passer de 968 euros à 1 147 euros, soit un gain de 179 euros par mois. « En 2040, dans le système cible, les différences s'accentuent avec un gain compris entre 260 euros et 500 euros par mois et le bénéfice à 100 % du dispositif pour les carrières à temps partiel », peut-on lire.
Pour avoir droit au minimum de pension dans sa totalité, il faudra avoir cotisé au moins 43 ans et avoir atteint l'âge d'équilibre. Si l'âge d'équilibre est atteint avant les 43 ans, en revanche, il n'y aura pas besoin de prolonger sa carrière pour le toucher.
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Qu'en est-il de l'âge de départ ?
Il ne va pas reculer pour tout le monde. Il y aura bien un âge d'équilibre de 65 ans pour la génération née en 1975, la première concernée par la réforme. En cas de départ en deçà de cet âge, le malus sera de 5 % par année manquante. Au-delà de cet âge il y aura un bonus de 5 %.
Mais dans le système actuel, la génération de 1975 devra avoir cotisé pendant 43 ans pour avoir une retraite à taux plein. Ce qui fait que, selon l'étude d'impact, 30 % des assurés vont avancer leur âge de départ « de deux ans en moyenne ». Au contraire, 20 % des assurés devront prolonger leur carrière de 2,5 ans en moyenne. Pour la moitié des assurés, donc, l'âge de départ ne changerait pas.
Au total, « la réforme entraîne un recul de l'âge effectif moyen de 6 mois pour la génération 1990 », reconnaît le gouvernement.
Les chiffres montrent toutefois que ce ne sont pas forcément les personnes les plus fragiles qui devront allonger leur carrière. Dans le système actuel, 35 % des 20 % de retraités les plus modestes de la génération née en 1965 devraient en effet déjà partir à la retraite à 67 ans faute d'avoir validé suffisamment de trimestres. Ils ne sont que 10 % dans ce cas parmi les 20 % de retraités les plus riches, selon le gouvernement. Cela est notamment dû aux personnes qui ont des carrières hachées avec des interruptions de carrière et doivent donc attendre longtemps avant de liquider leur pension.
À noter que le compte de prévention de la pénibilité (C2P) existant dans le secteur privé sera étendu à la fonction publique. Avec l'abaissement des seuils sur le travail de nuit, cela va faire progresser le nombre de bénéficiaires de 25 % au total en contrepartie de la disparition progressive des « catégories actives » de la fonction publique qui bénéficient de départs anticipés. Un million de personnes seraient concernées pour la génération de 1990 contre seulement 800 000 sans réforme.
Le nouveau système est-il défavorable aux femmes ?
Leur pension moyenne va augmenter en moyenne de 13 % pour la génération née en 1990, à condition qu'elles atteignent l'âge pivot de leur génération pour ne pas subir la décote. Un âge pivot qui sera réduit de 2 ans pour les carrières longues et ceux qui bénéficient du maximum de points de pénibilité.
Les dépenses de retraites vont-elles baisser en proportion du PIB comme le dénoncent les anti-réforme ?
Un peu à cause des mesures de redressement à court terme que doit prévoir la « conférence des financements ». En 2030, les dépenses de retraites devraient passer de 13,8 % du PIB à 13,5 %, une baisse de 0,3 point par rapport au scénario de référence du Conseil d'orientation des retraites. En 2040, cet écart se réduirait de 13,5 % avant réforme à 13,3 % avec réforme. En 2050, l'écart est mininime : de 13 % avant réforme à 12,9 % avec réforme.
L'équilibre financier sera assuré en 2027 grâce à la « conférence des financements » qui sera ouverte le 30 janvier jusque fin avril. Mais il se redégradera ensuite malgré le recul de l'âge pivot en fonction de l'augmentation de l'espérance de vie : les 2/3 de l'espérance de vie gagnée seraient consacrés au prolongement des carrières et 1/3 à la retraite (sauf si les les organisations patronales et syndicales décident de mesures alternatives). Ce sera donc à la gouvernance du système, piloté par les partenaires sociaux, de prendre des mesures d'ajustement supplémentaires.
Un simulateur, mis en ligne le 24 janvier et consultable ici, permet d'évaluer les conséquences du passage au régime universel sur son cas personnel en s'appuyant sur des parcours types proches de la situation réelle de la personne.