Rencontre internationale
Un symposium international, présidé par le préhistorien de réputation mondiale Jean Clottes, s'est tenue sur le sujet les 26 et 27 février derniers à l'initiative de la ministre de la Culture, Christine Albanel. Il a réuni des spécialistes américains, tchèques, espagnols, japonais et sud-africains. But de la réunion: "faire le point sur ce qui a été fait, ouvrir des fenêtres en écoutant d'autres experts, et avoir des pistes pratiques pour l'avenir", a expliqué Jean Clottes.
A l'ouverture de la manifestation, Christine Albanel a annoncé la création d'un nouveau comité scientifique pluridisciplinaire, ouvert aux sciences dites "dures" (à l'inverse des sciences humaines et sociales, dites "molles") et autonome face à l'administration. "Il faut confronter les propositions, les perspectives. Des erreurs ont sans doute été commises à cause de la complexité du site", explique-t-on au ministère (cité par Le Monde). Le paysage biologique de la grotte est "d'une complexité diabolique", rappelle pour sa part Jean Clottes : "une centaine ou plus de micro-organismes y cohabitent et interagissent, et il suffit qu'un prenne le dessus pour provoquer des catastrophes".
Quel diagnotic pour Lascaux ?
Actuellement, "la grotte ne connaît pas d'évolution brutale", la situation est "stable, légèrement évolutive", avec des "taches noires qui ne régressent pas, mais ne s'étendent pas", affirme le président de l'actuel Comité scientique, Marc Gauthier. "La grotte est malade, elle est actuellement en repos", sans aucun traitement, explique-t-il. "On veut que le malade se reconstruise, se rééquilibre de lui-même", ajoute-t-il.
Un diagnostic relativement optimiste que ne partagent pas forcément d'autres spécialistes… C’est notamment le cas de Laurence Leauté-Beasley, Franco-Américaine qui a créé aux Etats-Unis un Comité international pour la préservation de Lascaux (IPCL). Lequel IPCL a adressé à l'UNESCO en 2008 un rapport dénonçant la mauvaise gestion de la grotte. Il faut "cesser de dire que tout va bien à Lascaux. Depuis l'an 2000, l'administration a fait la politique de l'autriche et du déni public", affirme Laurence Leauté-Basley, citée par Le Monde.
Comment en est-on arrivé là ?
Apparemment, tout a basculé en 1999-2000 lors des travaux pour l'installation d'une nouvelle machine de conditionnement d'air. Les précautions sanitaires auraient été insuffisantes. Trop puissante et mal adaptée, l'engin aurait provoqué une rupture de l'équilibre climatique et biologique du site. Résultat: dès 2000, les peintures ont subi une invasion de champignons blancs avant l'apparition des taches noires.
Dans Le Monde, Jean-Michel Geneste, chargé du suivi et de la coordination scientifique du site, fait amende honorable. "Les travaux ont été le facteur déclenchant. Trop longs. Dans l'urgence, on a essayé de faire au mieux. On est en limite de méthode, confronté au maximum de nos savoir-faire", explique-t-il.
Le quotidien signale d'autres évènements qui n'auraient pas été sans conséquences sur l'état des peintures: un traitement à la chaux, "l'éclairage intensif des parois pour la réalisation d'un état des lieux en 3D" pendant "des centaines d'heures".
Une grotte maltraitée
"Aucune grotte au monde n'a été traitée de cette façon-là", déplore Marc Gauthier. Découverte en 1940, elle a subi des travaux, enduré des éclairages inadaptés, reçu de trop nombreux visiteurs (100.000 en 1962, soit 1800 par jour en été), et finalement souffert d'un système d'aération inadapté. Elévation de la température, humidité, augmentation du gaz carbonique s'en sont suivis, avec, dès 1960 l'apparition d'algues vertes et de calcite blanche sur les parois. Ce qui a incité le ministre de la Culture de l’époque, André Malraux, à décider sa fermeture au public en 1963.