Le rapport qui démolit le programme économique de Mélenchon
ENTRETIEN. Guillaume Hannezo, ancien conseiller de François Mitterrand, publie un rapport très sévère sur les conséquences du programme économique de la Nupes.
Par Michel Revol
Publié le 25/05/2022 à 07h30 - Modifié le 25/05/2022 à 12h45
Le « choix de Tsipras ». Ainsi les experts nomment-ils l'alternative tragique à laquelle le Premier ministre grec est confronté, en 2015, pour sauver son pays de la faillite : accepter la cure d'austérité sévère imposée par le FMI, ou plonger la Grèce dans le chaos. À l'époque, Tsipras opte pour la première solution ; il se soumet au FMI. Jean-Luc Mélenchon Premier ministre devrait-il, s'il appliquait l'entièreté de son programme, suivre la même voie ? Guillaume Hannezo le craint. Dans un rapport publié par Terra Nova, un think tank « progressiste » proche du centre gauche, le professeur associé à Normale Sup et ancien conseiller économique de François Mitterrand dresse un tableau inquiétant des mesures contenues dans le programme de la Nupes, l'alliance gouvernementale entre LFI, le PS, EELV et le PC.
La retraite à 60 ans (avec quarante annuités), la hausse du smic et des cotisations sociales auraient, selon cet expert, des conséquences désastreuses pour le pays
Les entreprises réduiraient les salaires pour retrouver leurs marges, et licencieraient.
Très vite, il faudrait creuser la dette pour financer le coût du programme, évalué par l'Institut Montaigne à 332 milliards d'euros annuels (250 milliards, selon la Nupes).
Les taux d'intérêt s'envoleraient, vidant d'autant plus les caisses de l'État.
la dette de la France, comme le suggère LFI ? La BCE, qui la détient en grande partie, refuserait.
La seule solution, selon Hannezo, serait une sortie de l'euro pour offrir à la France la possibilité de battre monnaie, entraînant une fuite massive des capitaux à l'étranger, une chute des investissements dans l'Hexagone et un appauvrissement sévère du pays.
« Quel que soit le choix retenu […], le coût d'une aventure populiste de ce type, ajouté à la dégradation tendancielle des finances publiques, affectera durablement le pouvoir d'achat des Français et aboutira in fine à des remises en cause profondes des mécanismes de solidarité, écrit Guillaume Hannezo.
Aucune gauche de gouvernement ne pourra jamais se remettre d'avoir participé à une telle expérience, si jamais elle devait voir le jour. »Les riches, ceux qui ont du patrimoine, ceux qui travaillent pour l'économie ouverte, savent naviguer dans ce genre d'accident historique. Ce qui sera ébranlé durablement, ce sera la solvabilité de l'État, c'est-à-dire le patrimoine de ceux qui n'en ont pas.
Le Point : S'il y avait une ligne directrice à retenir du programme économique que Jean-Luc Mélenchon veut appliquer, quelle serait-elle ?
Guillaume Hannezo : Le programme se présente comme un plan de relance, comme en 1981. Mais en fait cela n'a rien à voir. L'enveloppe de dépenses prévues est sept fois plus importante qu'en 1981 en proportion du PIB.
Elle emmènerait le déficit structurel entre 10 et 15 % du PIB, alors qu'en 1981 on était passé de 0 à 2,8 % . Et cela en partant d'une dette quatre fois plus élevée. Ce n'est pas un plan de relance, c'est un plan de dépôt de bilan.