Première adversaire à le défier officiellement, Haley devra parvenir à se démarquer suffisamment de Trump pour se présenter comme une alternative crédible, sans l'attaquer trop brutalement, au risque de se couper de la base du parti républicain.
Source:Le Figaro.
Nikki Haley est la première candidate à défier Donald Trump dans les primaires républicaines. L'ancienne gouverneur de Caroline du Sud a annoncé ce mardi depuis son État d'origine sa candidature à l'investiture de son parti pour la présidentielle de 2024.
« Les républicains ont perdu le vote populaire lors de sept des huit dernières élections présidentielles. Il faut que ça change », a-t-elle lancé dans un message vidéo. « Il est temps d'avoir une nouvelle génération de dirigeants ».
Sa candidature avait été annoncée depuis plusieurs mois. Même si elle avait déclaré en 2021 qu'elle ne se présenterait pas contre Trump pour l'investiture de 2024 s'il était candidat, elle avait commencé à préparer sa campagne. D'abord en s'impliquant dans celle des élections de mi-mandat, et en multipliant les interventions dans les médias.
Puis, en janvier dernier, elle avait laissé clairement entendre ses intentions dans un entretien à la chaîne Fox News. « La survie de l'Amérique est en jeu, et cela dépasse une seule personne. Et quand vous regardez l'avenir, je pense que le moment est venu pour un changement de génération ».
Nikki Haley doit commencer sa campagne dans les jours qui viennent en se rendant dans l'Iowa et le New Hampshire, les premières étapes des primaires républicaines l'année prochaine. « Je n'ai jamais perdu une élection », répète volontiers celle qui fut la première femme gouverneur de Caroline du Sud, et la première issue d'une minorité ethnique, en même temps que le plus jeune gouverneur du pays.
Nimrata Nikki Randhawa Haley, née dans une famille d'origine indienne, a été élue deux fois à ce poste en 2010 et en 2014, avant d'être nommée par Trump ambassadrice aux Nations unies. Les ambitions présidentielles ne manquent pas chez les républicains. Mais la candidature de Trump, annoncée en novembre dernier, incite beaucoup à la prudence. Toujours très populaire auprès de la base du parti, l'ancien président est un redoutable adversaire, en particulier dans les primaires.
Trump a dit en janvier avoir parlé avec Haley et l'avoir encouragée à se présenter. Il possède un instinct presque infaillible pour rabaisser et humilier ses adversaires, mais elle est l'une des rares personnalités républicaines qu'il n'a pas affublée d'un surnom méprisant.
Relations fluctuantes:
Les relations fluctuantes avec Trump ressemblent assez à celle de l'appareil du parti républicain. En 2016, elle avait soutenu la candidature de Marco Rubio, sénateur de Floride, puis celle de Ted Cruz, sénateur du Texas, et avait directement attaqué Trump quand il avait refusé de désavouer un membre éminent du Ku Klux Klan.
« Il ne représente pas notre parti. Ce n'est pas lui que nous voulons comme président », avait dit Haley. L'année précédente, elle avait fait retirer le drapeau Confédéré qui flottait sur le Capitole de Caroline du Sud après la tuerie à caractère racial perpétrée dans une église de Charleston.
Mais Haley avait elle aussi fini par se rallier, après la victoire de Trump aux primaires républicaines. Pressentie comme secrétaire d'État, elle avait finalement été nommée ambassadrice américaine aux Nations unies. À ce poste, elle avait incarné les principales mesures de la nouvelle administration sur la scène internationale. Elle avait quitté volontairement son poste en 2019 et était restée en bons termes avec le président.
Distances:
Elle avait fini par prendre ses distances après l'assaut sur le Capitole en janvier 2021. Mais elle a vite modéré ses critiques. « La plupart des politiques de Trump étaient remarquables et ont rendu l'Amérique plus forte, plus sûre et plus prospère », avait-elle expliqué à l'époque dans une tribune parue dans le Wall Street Journal.
« Beaucoup de ses actions depuis l'élection de 2020 étaient mauvaises et seront jugées sévèrement par l'histoire… je défendrai l'essentiel du bilan de Trump et sa détermination à secouer le statu quo et la corruption de Washington. Je ne défendrai jamais l'indéfendable ».
En temps normal, Haley ferait une remarquable candidate pour le parti républicain. Redoutable dans les débats, dotée d'un excellent sens de la répartie, conservatrice sur les questions de société et libérale dans le domaine économique, son sexe et son origine ethnique pourraient l'aider à se démarquer d'autres candidats plus classiques.
Son ascension politique indique assez bien ses qualités exceptionnelles et la force de détermination dont elle est capable. Nikki Haley est née en 1972 dans une région rurale de Caroline du Sud, dans une famille d'immigrants sikhs originaire du Penjab. Ses parents sont deux universitaires, d'abord installés au Canada, avant d'immigrer aux États-Unis. Élevée dans la foi sikh, elle se convertit au christianisme lors de son mariage, qui est célébré selon les deux rites religieux.
« Je suis fille d'immigrants indiens et fière de l'être », avait-elle déclaré à la convention républicaine de 2020. « Mes parents sont venus en Amérique et se sont installés dans une petite ville du Sud. Mon père portait un turban. Ma mère portait un sari. J'étais une fille brune dans un monde noir et blanc. Nous avons été confrontés à la discrimination et aux difficultés, mais mes parents n'ont jamais cédé aux griefs et à la haine ».
« L'Amérique n'est pas un pays raciste », mais plutôt « une histoire en perpétuelle transformation ».
Comptable dans la petite affaire familiale, elle se lance en politique en 2004 en étant élue à la chambre des représentants de Caroline du Sud. Après six ans à ce poste, cette quasi-inconnue crée la surprise en remportant l'élection au poste de gouverneur de l'état en 2010.La survie de l'Amérique compte, et c'est plus grand qu'une seule personne. Et quand vous regardez l'avenir de l'Amérique, je pense qu'il est temps pour un nouveau changement de génération
Se comparant volontiers à Margaret Thatcher, Haley a été portée tout au long de sa carrière par la force de sa personnalité et son sens politique, mais aussi par une bonne dose de chance. Elle en aura plus que jamais besoin. En se lançant dans la course à l'investiture républicaine, elle sera opposée à des adversaires redoutables, dont le plus dangereux est évidemment Donald Trump.
Première adversaire à défier officiellement Trump, Haley devra parvenir à se démarquer suffisamment de l'ancien président pour se présenter comme une alternative, tout en évitant de l'attaquer trop brutalement, au risque de se couper de la base du parti républicain.
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